Le Premier ministre géorgien Irakli Kobakhidzé a assuré jeudi 28 novembre que son gouvernement repoussait à 2028 son ambition d’intégrer l’Union européenne, accusant Bruxelles de « chantage » sur fond de crise politique après les législatives fin octobre. Cette annonce intervient quelques heures après l’adoption par le Parlement européen d’une résolution non contraignante rejetant les résultats des élections législatives en Géorgie qui ont donné la victoire au parti au pouvoir du Rêve géorgien. Le texte, qui dénonce des « irrégularités significatives », exige qu’un nouveau scrutin soit organisé dans un délai d’un an sous supervision internationale et que des sanctions soient prises à l’encontre de hauts responsables géorgiens, dont le Premier ministre Irakli Kobakhidzé.En réponse, ce dernier a accusé le Parlement européen et « certains politiciens européens » de « chantage ». « Nous avons décidé de ne pas mettre à l’ordre du jour la question de l’adhésion à l’Union européenne avant la fin de l’année 2028 », a-t-il annoncé. Il s’est toutefois engagé à poursuivre la mise en œuvre des réformes nécessaires, assurant que « d’ici 2028, la Géorgie [serait] mieux préparée que tout autre pays candidat à ouvrir des négociations d’adhésion avec Bruxelles et à devenir un État membre en 2030 ».Dans la foulée de cette annonce, des milliers de personnes se sont rassemblées à Tbilissi et dans d’autres villes de Géorgie. Dans la capitale, les manifestants ont agité des drapeaux de l’Union européenne et de la Géorgie et bloqué la circulation devant le Parlement et le siège du Rêve géorgien, qu’ils accusent de dérive autoritaire prorusse. Peu après minuit, la police anti-émeutes a tiré des gaz lacrymogènes contre les manifestants, ont constaté des journalistes de l’AFP sur place. Des agents masqués ont par la suite tiré des balles en caoutchouc dans leur direction et ont battu des protestataires et des journalistes présents. En face, les manifestants ont érigé des barricades qu’ils ont enflammées. Les médias locaux ont fait état de plusieurs arrestations. »Le gouvernement illégitime a déclaré la guerre à son propre peuple »La présidente pro-occidentale Salomé Zourabichvili, en rupture avec le gouvernement, a dénoncé sur X une « répression » qui se poursuivait selon elle à 06h30 locales (03h30 heure française) : « Des journalistes et dirigeants politiques sont ciblés. J’attends une réaction ferme des capitales européennes ». A la suite des déclarations du Premier ministre, la cheffe d’Etat, qui ne dispose que de pouvoirs limités en Géorgie, a organisé une « réunion d’urgence » avec des diplomates étrangers. « Aujourd’hui, le gouvernement illégitime a déclaré la guerre à son propre peuple », a-t-elle lancé lors d’une conférence de presse aux côtés des meneurs de l’opposition. « Je suis la seule institution légitime, la seule représentante légitime de ce pays ». Salomé Zourabichvili a déposé une demande d’annulation des résultats des législatives auprès de la Cour constitutionnelle, qui a peu de chances d’aboutir.Today marks the end of the constitutional coup unfolding for weeks. The course set months ago, taking us from Europe toward Russia, has now concluded.
Today, this illegitimate government declared not peace, but war—on its own people, past, and future. pic.twitter.com/06Q7WbzDrQ— Salome Zourabichvili (@Zourabichvili_S) November 28, 2024La Géorgie traverse une période de turbulences politiques depuis la victoire contestée du Rêve géorgien aux législatives de fin octobre. L’opposition boycotte le nouveau Parlement et les manifestations se succèdent, sans faire plier le pouvoir. Ancienne république soviétique, la Géorgie a obtenu officiellement le statut de candidat à l’adhésion en décembre 2023, mais Bruxelles a depuis gelé le processus, accusant le gouvernement du Rêve géorgien d’opérer un grave recul démocratique.Irakli Kobakhidzé, qui reprochait déjà à l’UE et aux Etats-Unis de vouloir entraîner la Géorgie dans la guerre entre la Russie et l’Ukraine, a demandé jeudi, devant les députés, que Bruxelles « respecte nos intérêts nationaux et nos valeurs traditionnelles ». Le Premier ministre est considéré comme un fidèle du puissant milliardaire Bidzina Ivanichvili, fondateur du Rêve géorgien et accusé par ses détracteurs de tirer les ficelles de la politique nationale.
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Publish date : 2024-11-29 07:10:56
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