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Pologne : la fuite en Hongrie d’un ex-ministre recherché sème la zizanie

Le Premier ministre polonais Donald Tusk arrive sous les yeux du Premier ministre hongrois Viktor Orban (R) pour participer à la réunion informelle des chefs d'État ou de gouvernement de l'Union européenne à Budapest, le 8 novembre 2024. (Photo Ferenc ISZA / AFP)




Autrefois nations sœur, la relation diplomatique entre la Pologne et la Hongrie a franchi un nouveau palier de tensions en fin de semaine. « L’ambassadeur hongrois en Pologne sera convoqué aujourd’hui pour recevoir une protestation officielle de la partie polonaise », a cinglé Varsovie dans un communiqué, vendredi 20 décembre au matin. Et de doubler le message en rappelant son propre ambassadeur en Hongrie pour « consultation ». La cause de cette brusque montée en température : un « acte hostile » de Budapest à l’égard de la Pologne, dénonce cette dernière.La veille, la Hongrie de Viktor Orbán a annoncé avoir accordé l’asile politique à un ancien secrétaire d’Etat au ministère de la Justice, recherché par les autorités de son pays. Marcin Romanowski, 48 ans, fait partie du PiS, ancien parti au pouvoir devenu l’opposition au Premier ministre polonais actuel, Donald Tusk. L’homme avait disparu des radars polonais il y a une dizaine de jours, après l’émission à son encontre d’un mandat d’arrêt par un tribunal polonais pour fraude présumée, ordonnant son placement en détention provisoire pour trois mois. Le parquet accuse cet ex-responsable politique, chargé de 2019 à 2023 de superviser un fonds d’aide aux victimes d’actes criminels, d’avoir commis onze infractions, dont le détournement de près de 40 millions d’euros.Après s’être promptement réfugié en Hongrie, Marcin Romanowski a « déposé une demande d’asile qui lui a été accordée, en conformité avec la législation hongroise et européenne », a ainsi révélé le directeur de cabinet du Premier ministre hongrois, jeudi 19 décembre, au journal Mandiner. Selon Budapest, « il existe des preuves concrètes de l’absence d’un procès équitable » en Pologne, si l’opposant acceptait d’y être jugé. D’après son avocat, il serait en vérité poursuivi « en raison d’actions à motivation politique ». La Hongrie lui a donc accordé l’asile en raison de « l’ingérence directe et de l’influence des hommes politiques de la majorité actuelle au pouvoir en Pologne sur l’enquête en cours », a défendu l’avocat de Marcin Romanowski, qui nie tout acte répréhensible. »Un acte hostile » envers VarsovieAprès avoir pris ses fonctions il y a environ un an, Donald Tusk a promis de passer un « balai de fer » sur l’ancien appareil d’Etat du PiS. « Tous ceux qui s’imaginent qu’ils pourront utiliser des astuces, des évasions et rester impunis se trompent », déclarait-il alors. Jarosław Kaczyński, le leader historique du PiS, a, lui, défendu la décision de Romanowski de demander l’asile en Hongrie, déclarant devant le Parlement polonais vendredi qu’il ne « fuyait pas la justice » mais évitait, au contraire, « les actions de personnes qui se trouvent à des endroits où elles ne devraient pas être ».La décision hongroise a été vécue comme un affront diplomatique par la Pologne, faisant monter la tension entre les deux nations. Le ministre polonais des Affaires étrangères, Radoslaw Sikorski, a immédiatement condamné sur le réseau social X « un acte hostile à la République de Pologne et aux principes de l’Union européenne ». Même réaction outrée du ministre de l’Intérieur, Tomasz Siemoniak, qui a répondu en dénonçant la posture de « confrontation » de Viktor Orbán.La Pologne menace d’impliquer la justice européenneVarsovie menace même, si Budapest ne remet pas Marcin Romanowski à la Pologne, de demander à la Commission européenne d’engager une procédure contre la Hongrie. Une situation « sans précédent », s’est encore indigné l’actuel ministre polonais de la Justice, Adam Bodnar. Selon lui, son pays ne peut pas se « permettre que de telles personnes échappent à leurs responsabilités ».Vingt-quatre heures avant que n’éclate ce nouveau scandale, Viktor Orbán accusait le gouvernement Tusk de contourner l’État de droit pour poursuivre ses intérêts et se venger du PiS. « Les patriotes polonais ont été expulsés du gouvernement, puis une coalition libérale arc-en-ciel a été formée. Nous sommes des patriotes, ils nous considèrent comme des ennemis », affirmait-il. « L’État de droit et les instruments juridiques sont utilisés pour régler des comptes avec les opposants politiques », ajoutait le Premier ministre hongrois.Les relations entre Varsovie et Budapest se sont fortement dégradées depuis la défaite aux législatives d’octobre 2023 du parti nationaliste Droit et Justice (PiS), dont Viktor Orbán était proche, et l’arrivée au pouvoir des forces pro-européennes emmenées par Donald Tusk. Avant cette annonce, le dirigeant hongrois avait promis d’offrir l’asile à toute personne faisant l’objet de « poursuites politiques ». La Pologne se prépare à reprendre la présidence tournante de l’UE à la place de la Hongrie le mois prochain. Donald Tusk a déjà annoncé une remise à zéro sous la direction de Varsovie.



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Publish date : 2024-12-21 13:34:20

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