195 tentes désertes. Près de 2 400 lits vacants depuis des semaines. Dans l’enclave américaine de Guantanamo, la rétention de migrants n’est plus qu’un lointain souvenir. Mardi 14 mars, un responsable américain au sein du ministère de la défense annonçait que les 40 derniers étrangers avaient été renvoyés par avion en Louisiane. Un Etat dans lequel la police fédérale de l’immigration (ICE) possède une agence. Deux semaines plus tôt, 48 migrants avaient déjà été transférés de la baie de Guantanamo à l’Etat situé dans le sud-est du pays, s’ajoutant à l’expulsion de Cuba fin février de 177 Vénézuéliens, renvoyés dans leur pays.
Des infrastructures incompatibles avec les normes gouvernementales
Il y a deux mois pourtant, le président américain était plein d’ambition et s’engageait sur un terrain glissant : celui de développer un centre géant de rétention pour 30 000 migrants à Guantanamo. Un lieu où les « pires criminels étrangers » devaient être envoyés. Durant sa campagne électorale, le républicain avait rapidement donné le ton, accusant les migrants d’être des « criminels » qui « empoisonnent le sang » des Etats-Unis, et avait promis de mener « la plus grande opération d’expulsions de l’histoire du pays ».
Connue pour détenir des suspects arrêtés après les attentats du 11 septembre 2001, la base navale américaine de Guantanamo dispose d’un centre de détention militaire, de salles d’audience et d’une installation séparée utilisée depuis plusieurs décennies pour détenir des migrants. Nul besoin de préciser pourquoi les ambitions de Donald Trump d’agrandir une prison militaire de haute sécurité pour détenir des étrangers se sont se sont heurtées à de vives réactions des défenseurs des droits des migrants.
D’autant plus qu’à l’origine, les autorités avaient déclaré qu’elles n’enverraient à Guantanamo que des étrangers en situation irrégulière aux Etats-Unis connus pour avoir des antécédents criminels. Mais deux mois après, les législateurs ont été forcés de constater qu’une grande partie des personnes détenues dans la baie américaine de Cuba étaient considérées comme « à faible risque », signifiant qu’un juge avait bien ordonné leur expulsion du pays, mais qu’elles n’avaient en aucun cas commis de crimes.
La qualité des infrastructures a également été la cible de critiques. Dès le départ, les tentes dans lesquelles séjournaient les migrants ont été jugées incompatibles avec les normes gouvernementales requises par l’ICE. D’après des législateurs s’étant rendus sur place et interviewés par le Wall Street Journal, les tentes étaient ouvertes sur l’extérieur et sentaient la moisissure en raison de l’absence d’air conditionné. Ces mêmes sources ont également pu observer que les abris ne possédaient aucun revêtement au sol et reposaient uniquement sur de l’herbe et de la terre.
20 000 dollars pour le transfert d’un seul migrant
A l’heure actuelle, des centaines de soldats du United States Southern Command (responsable des actions militaires des Etats-Unis en Amérique centrale, Amérique du Sud et aux Caraïbes) sont toujours déployés sur la base pour surveiller les installations, mais devraient retourner aux Etats-Unis dans les prochaines semaines, selon un responsable interrogé par le Wall Street Journal. Et pour cause, après un échec cuisant d’un point de vue humanitaire, l’administration Trump encaisse un bilan financier désastreux.
Dans le cadre d’une visite de délégation du Congrès sur la base américaine, la représentante démocrate Sara Jacobs a appris que l’opération anti-immigration de Donald Trump avait jusqu’à présent coûté 16 millions de dollars. Un budget qui ne semble pas inclure les vols onéreux qui ont transporté les migrants, les troupes militaires ainsi que les ravitaillements. L’administration Trump avait d’abord choisi d’effectuer les premiers transferts via les avions C-17 et C-130 de l’armée de l’air. Une analyse du Wall Street Journal a révélé que le déplacement d’un seul étranger vers la baie de Guantanamo à bord de ces véhicules coûtait plus de 20 000 dollars. A la mi-février, les vols militaires ont donc été suspendus, et des avions civils ont ensuite été utilisés.
Le transport n’a pas été le seul coût pour les contribuables. La représentante démocrate a déclaré que sur l’argent dépensé par le département de la Défense des Etats-Unis, 3,1 millions de dollars ont été uniquement consacrés pour la mise en place de tentes, qui, in fine, n’ont jamais été opérationnelles.
Mais l’expulsion de l’ensemble des migrants de la baie de Guantanamo ne signifie pas nécessairement que le projet de Donald Trump soit définitivement abandonné. Deux responsables fédéraux ont déclaré à l’Associated Press que l’administration envisage d’utiliser les installations pour héberger les migrants qui seraient en train de se diriger vers les Etats-Unis par la mer. Ne reste plus qu’à savoir combien de millions de dollars supplémentaires devront encore être dépensés pour ces infrastructures respectent les normes de l’ICE.
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Author : Aurore Maubian
Publish date : 2025-03-17 19:00:00
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