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Pétrole vénézuélien : la stratégie de Donald Trump pour faire pression sur la Chine et l’Inde

Pétrole vénézuélien : la stratégie de Donald Trump pour faire pression sur la Chine et l’Inde

Une fois de plus, Donald Trump ressort son arme fétiche. Le président américain, qui a fait de l’imposition de droits de douane l’alpha et l’oméga de sa politique économique, vient de nouveau d’utiliser cet outil. Sa cible ? Le Venezuela, « très hostile » aux Etats-Unis selon le dirigeant. Caracas est accusé par le milliardaire de faciliter la venue « sciemment et sournoisement » de « dizaines de milliers de criminels et autres » en Amérique. Lundi 24 mars, il a donc annoncé depuis le bureau Ovale avoir signé un décret permettant de taxer de manière supplémentaire les produits de l’ensemble des pays qui se fourniraient en pétrole vénézuélien.

Fidèle à sa volonté de laisser planer le doute, Donald Trump a aussi évoqué une mesure similaire concernant les achats de gaz. Mais aucune mention de ce point précis n’a été inscrite dans le texte officiel, publié en ligne par la Maison-Blanche. Dans le détail, les clients se fournissant en pétrole vénézuélien s’exposent donc à 25 % de droits de douane supplémentaires pour toutes les marchandises exportées aux Etats-Unis. Ces taxes pourront « s’ajouter à celles déjà existantes », a promis le dirigeant américain. Art du bluff ou non, le décret ne prévoit pas d’automaticité de ces sanctions : la sanction infligée à chaque acheteur de Caracas sera décidée au cas par cas, à l’appréciation du secrétaire d’Etat américain Marco Rubio.

La Chine, principale cliente de Caracas

Dans tous les cas, le Venezuela va pâtir de ces nouvelles menaces. Le président du pays, Nicolás Maduro, a dénoncé lundi soir à la télévision la démarche américaine. « [Les Etats-Unis] peuvent sanctionner et imposer des droits de douane sur tout ce qu’ils veulent, mais ils ne peuvent pas sanctionner l’amour et le patriotisme du peuple vénézuélien », a-t-il lancé. Au-delà de la question tarifaire, Donald Trump avait déjà annoncé fin février remettre en cause l’autorisation de licence d’exploitation au Venezuela accordé au géant américain du pétrole Chevron… même si le gouvernement semble pour le moment avoir accepté la poursuite de ses activités jusqu’à fin mai.

Déjà sanctionnée aujourd’hui, Caracas peut craindre l’asphyxie avec l’annonce de ces mesures. Mais, avec cette initiative, Donald Trump vise bien plus loin qu’à étouffer un peu plus l’économie de l’Etat sud-américain. Le républicain souhaite aussi toucher les principaux clients du Venezuela : la Chine et, dans une moindre mesure, l’Inde. Pékin constitue en effet le principal importateur de pétrole produit dans le pays. Et de loin : la Chine importe chaque jour plus de 500 000 barils de pétrole brut. Une manne importante pour le pays, dont la demande d’or noir n’a cessé de croître ces derniers mois.

La perspective de nouvelles sanctions douanières, en plus des tarifs de 20 points de pourcentage déjà mis en place par Washington sur les produits chinois, a de quoi inquiéter le pouvoir de Xi Jinping. « Nous appelons les Etats-Unis à cesser de s’ingérer dans les affaires intérieures du Venezuela et à abolir les sanctions unilatérales illégales imposées au Venezuela », a exhorté le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Guo Jiakun, lors d’une conférence de presse ce lundi. Les précédentes sanctions américaines contre Pékin avaient été justifiées par Donald Trump comme la conséquence de l’inaction supposée de la Chine contre le trafic de fentanyl, cette drogue très consommée aux Etats-Unis.

Cibler l’Inde, « reine des droits de douane » selon Donald Trump

De la même manière, le président américain vise par ailleurs à toucher l’Inde avec cette mesure. New Delhi achète également beaucoup de pétrole au Venezuela : sur deux des trois derniers mois, il fut même son premier client en la matière. Or, la politique commerciale indienne est dans le collimateur de Washington, qui lui reproche son important taux d’imposition douanier – il est vrai bien supérieur en moyenne à celui des autres puissances mondiales. Requalifiée de « reine des droits de douane » et de « grande agresseuse » en matière commerciale par Donald Trump, l’Inde pourrait elle aussi souffrir de taxes douanières plus importantes sur ses exportations.

Les mesures liées à l’achat de pétrole vénézuélien doivent intervenir le 2 avril prochain, au même moment que les possibles droits de douane « réciproques » promis par Donald Trump à ses partenaires économiques. Pékin et New Delhi auraient donc tout intérêt à trouver des alternatives à l’or noir produit par Caracas. Selon certains experts, un autre pays pourrait alors bénéficier du report des commandes vers son offre : la Russie.

Moscou, elle aussi sous sanctions économiques liées à la guerre en Ukraine, utilise depuis des mois une « flotte fantôme » pour continuer de livrer son pétrole. « Il est peu probable que la Chine et l’Inde risquent de se voir imposer des droits de douane supplémentaires pour accéder au pétrole lourd vénézuélien, alors qu’elles peuvent acheter du brut russe », souligne ainsi David Goldwyn, analyste américain spécialiste des questions d’énergie, interrogé par l’agence Reuters. Un enjeu de taille, au moment où les délégations russe et américaine discutent d’un potentiel accord de cessez-le-feu sur le sol ukrainien…



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Publish date : 2025-03-25 13:49:00

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