Un président ? Quel président ? Rachida Dati n’a pas rencontré Bruno Retailleau depuis son arrivée à la tête des Républicains (LR). La ministre de la Culture croise bien son homologue en Conseil des ministres, mais aucun rendez-vous n’a encore réuni les deux personnalités. La sarkozyste et le filloniste. La puncheuse et le moine soldat. L’ancienne députée européenne entretient une relation distante avec le Vendéen, avec lequel elle partage si peu. Difficile d’imaginer des profils aussi antinomiques. « Il n’y a pas de mésentente particulière entre eux, mais ils ont des manières de faire de la politique très différentes », glisse un proche de Bruno Retailleau.
Le Vendéen a bien reçu un jour un SMS salé de Rachida Dati, agrémenté d’un émoji « gant de boxe ». « Tu tiens sur moi des propos racistes », l’accusait-elle, comme l’a raconté L’Express. Mais ces invectives sont d’usage à droite. Qui n’a jamais reçu un message éruptif de la maire du 7e arrondissement de Paris ? Alors, Bruno Retailleau a pris les devants. Au printemps, il demande à un cadre de la droite parisienne : « Explique-la-moi. Je n’ai pas le mode d’emploi. » Car leurs destins sont désormais liés.
« On ne va pas s’amuser à envoyer une candidature de témoignage »
Le nouveau patron des Républicains (LR) érige les élections municipales de 2026 en « priorité », à l’aube de la présidentielle. Il espère y marquer des points, à la faveur d’accords locaux. Rachida Dati souhaite, elle, concourir sous la bannière commune de la droite et des macronistes à Paris. Ella a repris sa carte aux Républicains, après avoir rejoint le chef de l’Etat en janvier 2024.i
A droite, la candidature parisienne de Rachida Dati est d’abord envisagée avec fatalité : « Il n’y a personne d’autre. » La sentence est prononcée ad nauseam en interne. Faute d’alternative sérieuse, LR n’aurait d’autre choix que de se ranger derrière la ministre de la Culture. La candidature du sénateur Francis Szpiner n’est aujourd’hui pas de nature à concurrencer celle de Rachida Dati. En janvier 2024, Éric Ciotti avait suscité des sarcasmes en promettant de lui opposer un candidat LR, quelques jours après son arrivée au gouvernement Attal. « Ton candidat s’appelle Mister Nobody », lui avait rétorqué le maire du 15e arrondissement Philippe Goujon. « Si on veut avoir une chance de gagner Paris, c’est elle », résume un député LR, à l’analyse proche de cet autre cadre : « On ne va pas s’amuser à envoyer une candidature de témoignage car les élus pourris gâtés de la droite à Paris se font la guerre. »
Alors, on ferme les yeux sur son départ en fanfare en macronie début 2024. François-Xavier Bellamy n’a pas oublié sa participation, debout sur sa chaise, à un meeting de Renaissance lors des dernières européennes. Il garde ce souvenir amer pour lui. « Le Macronisme existe », a écrit Rachida Dati sur X, en réponse à sa collègue LR Sophie Primas, qui a théorisé sa disparition future. La porte-parole du gouvernement a souri à la lecture de ce message. Que ne faut-il pas faire pour incarner le rassemblement ? Au moins Rachida Dati s’est gardée de la critiquer publiquement ! LR jette enfin un voile pudique sur la relation mouvementée entre la ministre et une partie de la droite parisienne, sur fond d’examen de la loi Paris-Lyon-Marseille (PLM). Elle préfère se raccrocher à la détermination et la popularité de la ministre de la Culture, ses atouts maîtres.
Les élus LR sidérés par une séquence télévisée
Dati, le choix du pragmatisme. Pourtant, à bas bruit, les doutes apparaissent. Sa mise en examen dans le cadre de l’affaire Carlos Ghosn, conjuguée aux révélations de l’Obs et de « Complément d’enquête » sur ses activités au Parlement européen, préempte l’espace médiatique. Une campagne parasitée par les affaires, la droite a déjà donné. L’intéressée contribue à cette situation. Le mercredi 18 juin, elle est invitée de l’émission C A vous, sur France 5. Article de Mediapart à l’appui, Elle menace le journaliste Patrick Cohen, qui a eu l’outrecuidance de l’interroger sur les affaires. « M. Cohen, avez-vous harcelé vos collaborateurs ? Est-ce que c’est vrai, M. Cohen ? […] Vous pourriez aussi tomber sous le coup de ce délit [de harcèlement]. Il suffirait que je fasse un article 40 pour dénoncer suite à ce papier de Mediapart. Je peux saisir le tribunal […], je peux le faire. »
La séquence a sidéré nombre d’élus LR par sa violence. L’élection parisienne est sociologiquement complexe pour la droite. La candidate n’est-elle pas trop clivante ? A-t-elle le profil pour arracher des voix au centre ? Mais tous gardent leurs réserves pour eux, tant le principe de réalité écrase tout. La perspective de l’alternance supplante les doutes. Mais ces derniers n’inclinent pas à l’empressement. Bruno Retailleau ne s’est pas encore exprimé sur ce scrutin. Un élu proche du ministre résume : « Si on se range derrière elle, cela devra arriver à la fin d’un processus. Je n’envisagerai pas l’alliance tant qu’elle n’est pas indispensable. » Encore un instant, monsieur le bourreau.
Source link : https://www.lexpress.fr/politique/lr/municipales-a-paris-entre-rachida-dati-et-la-droite-comme-un-air-de-resignation-WVX4JUGFK5HSPKCJ3Q24RAOVV4/
Author : Paul Chaulet
Publish date : 2025-06-20 15:00:00
Copyright for syndicated content belongs to the linked Source.