Le Parisien

L’ombre de la dermatose nodulaire plane sur les éleveurs de la filière Comté dans le Jura



La neige a presque disparu, sur les contreforts du massif jurassien. Dans son étable à Bonnétage (Doubs), Jérémy Boillon termine la traite ce mercredi soir, en compagnie de ses parents, loin de l’agitation qui secoue le territoire depuis quelques jours.« La zone de surveillance se rapproche, nous sommes à moins de dix kilomètres », glisse le producteur de lait qui sert pour la fabrication du Comté. La veille, une opération de gendarmerie a été menée sur la commune de Pouilley-Français et a conduit à l’abattage d’un troupeau contaminé par la dermatose nodulaire contagieuse. Une situation qui a plongé dans l’angoisse la filière Comté, qui compte 150 000 vaches dont la production est à la base de la réputation du fameux fromage.Un virus transmis par des piqûres d’insectesLa maladie est apparue dans le Doubs, le 28 novembre dernier. Ce virus, qui se transmet principalement par les piqûres de taon, de mouche, ou le déplacement d’animaux infectés, a touché une exploitation à l’ouest de Besançon. Un vétérinaire a constaté l’apparition de ganglions sur un troupeau vacciné le 22 octobre, soit 36 jours avant l’apparition des symptômes. « Tant que l’on n’a pas atteint l’immunité et que l’animal se fait piquer par un stomoxe ou un taon, il peut développer la maladie », préviennent les services de l’Etat.L’émotion suscitée par cet abattage a poussé des centaines de manifestants à se réunir sur l’exploitation. Un face-à-face sous haute tension qui a donné lieu à des affrontements entre les gendarmes et les agriculteurs. Les 83 vaches de l’exploitant ont finalement été euthanasiées. Face aux militants qui prônaient le confinement de la ferme pour éviter la mort des animaux, le directeur départemental de la DDETSPP a indiqué : « Une étable n’est pas un lieu confiné. La mouche où le taon qui entre et sort peut se déplacer jusqu’à 5 km. »« Cette maladie pourrait nous amener à abattre un cheptel complet, souffle Jérémy Boillon. Ici, nous avons 85 vaches. Elles représentent des décennies de génétique et des générations d’éleveurs. On parle d’indemnisation, mais elle sera moindre face au préjudice que l’on subit. Sans parler du préjudice moral : il faut savoir qu’un éleveur se lève tous les matins pour voir ses bêtes. Imaginer une étable vide, c’est un crève-cœur… »D’autres solutions que l’abattage des bêtes ?Dans sa ferme à 900 m d’altitude, l’éleveur s’interroge face aux préconisations des services de la préfecture du Doubs. « Après les premiers cas en Savoie, on nous a dit que la seule solution était d’abattre tous les animaux. Aujourd’hui, on entend d’autres sons de cloche. Est-ce qu’il ne serait pas possible d’étudier un troupeau atteint, pour voir ce qui se passe ? (NDLR : le taux de mortalité se situe entre 1 et 5 %.) À cette période de l’année, il y a peu de contact, moins d’insectes, pourquoi ne pas imaginer d’autres solutions ? »Chaque jour, le lait produit par Jérémy Boillon est collecté au sein de la coopérative agricole de Cerneux-Monnot labellisé agriculture biologique. « Dans le Comté, le bio est une niche. Si demain, je perds mon troupeau, ce sera quasiment impossible de retrouver des vaches montbéliardes en bio et ça mettrait en péril une petite coopérative agricole comme la nôtre avec les investissements en cours. »L’épée de Damoclès plane donc au-dessus des fermes du département. La première AOP de France, qui produit chaque année 65 000 tonnes de fromage, attend désormais la suite, avec la crainte qu’un nouveau foyer se déclare et que la zone de surveillance s’étende, dans les jours à venir.



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