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Réseau de tunnels du Hamas : après un an de guerre à Gaza, Israël en vient-il à bout ?

Photo prise lors d'une visite contrôlée et éditée sous la supervision de l'armée israélienne montrant des soldats israéliens à l'entrée d'un tunnel à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, le 13 septembre 2024




C’est un énième appel à l’évacuation auquel est confrontée la population de Gaza : ce samedi 5 octobre, l’armée israélienne a dit se préparer à agir « avec force » contre le Hamas dans une partie du centre de l’enclave. Une annonce qui intervient alors que Tsahal, bien que poursuivant ses frappes aériennes quotidiennes sur la bande de Gaza, n’avait pas lancé de raid majeur depuis plusieurs semaines, se concentrant sur les affrontements avec le Hezbollah à la frontière libanaise, et sur la sécurisation du corridor de Philadelphie, à la frontière avec l’Egypte.Un an après les attaques terroristes du 7 octobre et le début d’un conflit qui a fait près de 42 000 morts à Gaza (selon le dernier bilan du ministère de la Santé du Hamas), l’armée israélienne poursuit inlassablement l’un de ses principaux objectifs : la destruction des installations militaires du Hamas, cachées au sein d’un large et complexe réseau souterrain de tunnels. Mais fait-elle des progrès ? Des mois après le début de l’offensive terrestre, et à mesure que l’enquête des services israéliens avance, on en sait un peu plus sur la manière dont le Hamas s’est attelé, pendant des années de clandestinité, à la construction de ses installations souterraines. Et aussi à quel point il sera difficile, pour Tsahal, d’en venir totalement à bout. »Le métro de Gaza », toujours largement opérationnelEn janvier 2024, les responsables de la défense israélienne ont estimé que la longueur du réseau de tunnels du Hamas, aussi appelé « le métro de Gaza », était comprise entre 500 et 700 kilomètres. « Un chiffre stupéfiant étant donné que l’enclave n’a qu’une superficie totale de 360 kilomètres carrés », remarque The Times of Israël. Cet été, le quotidien israélien révélait que l’armée s’inquiétait du fait « qu’après neuf mois de guerre, une grande partie du réseau était toujours en bon état de fonctionnement dans de nombreuses parties de Gaza », et que le groupe avait toujours la capacité d’organiser des raids près de la frontière avec Israël, bien que sans commune mesure avec ceux du 7 octobre. Si la guerre devait se terminer maintenant, le Hamas, qui a par ailleurs reconstruit une partie des tunnels frappés par Israël, aurait toujours la capacité de nuire, selon le journal.Bien sûr, l’organisation qui comptait 35 000 soldats avant la guerre a été fortement diminuée. « Le groupe a perdu son principal dirigeant politique [NDLR : Ismaïl Haniyeh] ainsi que des dizaines de commandants militaires et environ 15 000 combattants, selon les responsables des services de renseignement régionaux », synthétise The Washington Post, dans une longue enquête publiée sur le réseau souterrain de Gaza. « Les stocks d’argent et d’armes s’amenuisent. Un grand nombre des quelque 5 700 tunnels du groupe ont été détruits par les bombes israéliennes », énumère-t-il encore.Mais la traque des combattants de l’organisation islamique s’apparente à une chasse à l’homme sans fin. « Des responsables des Forces de défense d’Israël ont décrit leur désarroi après s’être frayé un chemin dans des bunkers situés à des dizaines de mètres sous les rues de Gaza, pour découvrir des puits menant à des tunnels plus profonds encore », indique le quotidien américain. Bien que Tsahal connaissait depuis longtemps la menace que représentent ces tunnels, utilisés par le Hamas en 2006 pour capturer le soldat Gilad Shalit, et que les forces israéliennes avaient déployé des capteurs le long de la frontière, elles n’avaient pas idée de la taille et la complexité de ces tunnels.Une ville sous la villeRéseaux routiers et de communication, ateliers de fabrication d’armes, stockages de provisions, abris anti-bombes, hôpitaux de campagne, logements (devenus parfois des lieux de détention d’otages) : les tunnels du Hamas sont une ville sous la ville. « Malgré des années de blocus israélien, le groupe est parvenu à acquérir un arsenal de roquettes, d’explosifs, d’armes légères, tout en construisant un réseau financier et défensif, ayant permis aux chefs du Hamas de tenir pendant des mois, malgré le siège de l’une des plus puissantes armées au monde », résume The Washington Post.Le réseau fonctionne d’ailleurs de manière relativement autonome. À la surprise des renseignements américains et israéliens, qui pensaient que la majeure partie des munitions du Hamas étaient fournies par l’Iran, ce ne sont pas des usines d’assemblage qui ont été retrouvées à Gaza, mais bien une multitude de petits ateliers de manufactures d’armes terrés à quelques mètres de profondeur, qui produisent a priori 80 % de l’arsenal du Hamas. Passant entre les mailles du blocus israélien, l’organisation accumulait des composants venus de l’extérieur, aussi rudimentaire que des produits chimiques agricoles, destinés à la fabrication d’explosifs.Une difficulté pour IsraëlSe donnant les moyens de ses ambitions, le Hamas a collecté des dizaines de millions de dollars, auprès de l’Iran et du Qatar, mais aussi grâce aux taxes locales et en détournant certaines aides internationales, afin de financer la construction de ce labyrinthe bétonné, ou encore de payer les combattants du Hamas. Des dépôts de banques ont également été volés dans la bande de Gaza après le début de la guerre.Cette infrastructure complexe, terrée au milieu d’installations civiles, donne du fil à retordre à l’armée régulière israélienne. « Combattre un ennemi capable de se déplacer horizontalement et verticalement, sur un champ de bataille situé dans une zone urbaine très peuplée, constitue un formidable défi militaire », explique ainsi Dana Stroul, secrétaire adjoint à la défense pour le Moyen-Orient pendant les trois premières années de l’administration Biden. Un responsable de la défense a également déclaré au Times of Israel « que le démantèlement des tunnels pourrait prendre des années. Il a précisé que les passages souterrains doivent être cartographiés et vérifiés pour détecter les pièges et les otages avant que les forces israéliennes ne puissent les détruire ».Autre problème de taille pour Israël : un second réseau militaire, celui du Hezbollah cette fois. Cet été, la milice chiite, probablement dans le but d’envoyer un message fort à l’État hébreu, a publié des renseignements indiquant l’étendue de ses souterrains au Liban. Dans les images diffusées, des membres de Hezbollah sont montrés se déplaçant dans un labyrinthe de tunnels éclairés, avec des véhicules transportant des armes. Le leader du groupe, Hassan Nasrallah, décédé depuis, y évoque la possession de missiles de précision, préparant ainsi le terrain à une réponse potentiellement violente en cas d’agression israélienne.A l’époque, l’analyste militaire Hisham Jaber, un général libanais à la retraite, expliquait auprès de l’AFP que l’on savait peu de choses sur les bunkers et tunnels « top secret » du Hezbollah. « Les avions de guerre ne peuvent pas atteindre ces installations […] et les combattants pourraient rester à l’intérieur de tunnels bien approvisionnés pendant des mois ». Israël pourrait en réalité « continuer à détruire le Liban pendant des mois sans jamais atteindre » les bunkers, a-t-il ajouté.



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Publish date : 2024-10-05 16:27:38

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