La rue de la République est la grande artère commerciale de Lyon. Autant dire que les élus n’ont pas caché leur inquiétude lorsqu’un KFC a failli s’installer à la place du restaurant L’Entrecôte, véritable institution du lieu. Une catastrophe, aux yeux de Camille Augey, l’adjointe chargée de l’emploi et de l’économie durable. Et pour cause : dans les alentours immédiats du vénérable établissement trônent déjà un McDo, un Quick, sans oublier Les Burgers de papa. En termes de diversité, on a déjà vu mieux… « Heureusement, se félicite l’élue écologiste, nous sommes intervenus auprès du bailleur et avons pu négocier un accord concernant le loyer, qui a permis de maintenir L’Entrecôte. »Les Français le proclament sondage après sondage : ils plébiscitent les petits commerces de proximité. Seulement voilà : en raison de la hausse du foncier, les meilleurs emplacements sont souvent récupérés par les grandes marques. De surcroît, la restauration rapide se rapproche des centres-villes pour capter l’énorme marché de la livraison à domicile. L’évolution de la rue de la République ces dernières décennies en témoigne. L’ancien Pierre Cardin est aujourd’hui dévolu à un Prêt à manger. Le magasin de sport Sporama a été remplacé par un Starbucks ; l’ancienne pâtisserie-chocolaterie-glacerie Debeaux a laissé place à un Quick…Il ne s’agit pas de s’opposer par principe à ces magasins. « Un centre-ville qui fonctionne a besoin à la fois de commerces locaux et de grandes enseignes, rappelle Emmanuel Le Roch, le délégué général de Procos, la Fédération du commerce spécialisé. En fait, le consommateur exige à la fois les marques célèbres qu’il connaît et les boutiques originales qui donnent à chaque ville sa spécificité. »Une arme de dissuasion massivePour préserver ce délicat équilibre, les élus disposent d’une arme de dissuasion massive : le droit de préemption, qui leur permet de se substituer à un acquéreur pressenti. A ceci près qu’aucune municipalité n’a les moyens financiers de tout acheter. « Nous faisons face à des limites budgétaires, plaide Camille Augey. Et puis, le droit de préemption permet certes de bloquer une vente, mais pas d’exproprier les commerces déjà existants. »Dans ces conditions, que faire ? Certaines municipalités font preuve de volontarisme politique. Rennes a proscrit les chaînes de restauration rapide de son hypercentre. Montpellier préempte des locaux pour favoriser des commerces indépendants moyens et haut de gamme. Paris, qui possède 10 % des pieds d’immeuble, y installe en priorité des magasins de proximité et revendique le titre de « première ville d’Europe en nombre de commerçants et artisans par habitant ».A Lyon, Camille Augey plaide pour une modification de la loi. « Il faudrait permettre aux maires d’encadrer les loyers commerciaux, comme cela existe pour les logements », plaide-t-elle, en s’inspirant d’une idée de Martine Aubry, la maire de Lille. Une suggestion qui laisse sceptique Johanna Benedetti, la présidente de l’association de commerçants lyonnais My Presqu’île. « Dans bien des cas, cela reviendrait à accorder un cadeau à McDo et aux autres, qui n’en ont aucunement besoin. » Aussi suggère-t-elle une tout autre idée. « Les préfets devraient pouvoir interdire les établissements de restauration rapide autour d’un établissement scolaire. Il en va de la santé de nos enfants ! »Il est vrai que l’on n’est jamais à l’abri de mauvaise surprise. Voilà quelque temps, la ville de Lyon avait réussi à bloquer un autre KFC, qui souhaitait s’implanter dans le quartier de la Croix-Rousse. Qu’à cela ne tienne : le spécialiste du poulet cuit a finalement jeté son dévolu sur un autre local, situé… rue de La République.
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Author : Michel Feltin-Palas
Publish date : 2024-11-18 08:00:00
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