L’Express

François Bayrou, un Premier ministre parti pour (ne pas) rester ?




Cruelle politique… A peine nommé Premier ministre, tout juste est-il parvenu à fabriquer – non sans difficulté – son gouvernement, que le temps de François Bayrou est déjà compté. Ce n’est pas tant la faute de ses bourdes à répétition aux premières heures de sa mission (son déplacement polémique à Pau, son idée de revenir sur le non-cumul des mandats ou encore ses mots sur Mayotte « pas en France »), que d’un état de fait politique. La dissolution voulue par Emmanuel Macron et son refus de se soumettre à une cohabitation ne peuvent faire naître que des chimères. Une question, si simple en apparence, se pose à François Bayrou : quel sens donner à sa tâche ?Le Parti socialiste lui a pourtant offert une voie de passage, mince et glaciale certes, mais une voie de passage tout de même : les roses d’Olivier Faure ont martelé leur refus de participer à un gouvernement, mais se disaient ouvertes à un pacte de non-censure en échanges de garanties (la suspension de la réforme des retraites et la mise en place d’une conférence de financement, les services publics ou encore le pouvoir d’achat). Impossible pour Bayrou car impossible pour le bloc central, dont le Premier ministre a besoin pour tenir tant bien que mal.Alors pour que tout change, faut-il que rien ne change ? Le voilà capitaine d’un aréopage similaire en tout point à celui de Michel Barnier, dont on peine à percevoir l’objet. Bayrou, en bon centriste, espérait que le dépassement des clivages, en recrutant des personnalités venues de tous bords, serait une assurance-vie, mais sans contrat de coalition, à quoi bon ? C’est l’illusion d’un rassemblement qui prévaut. Ce n’est pas parce qu’on vient de la droite ou de la gauche que l’on est encore un des bergers de l’une ou de l’autre. Prenez Manuel Valls, l’ancien Premier ministre socialiste devenu ministre des Outre-mer : l’est-il encore, de gauche ? Pas aux yeux du NFP, où l’on jure savoir ce qui est ou n’est pas (de gauche). Sa forfaiture après la primaire de la gauche en 2017, ses pérégrinations à l’étranger, ses offres de services, répétées, à Emmanuel Macron ont fait de lui un centriste comme un autre.Drame du centrismeDe l’autre côté, à droite, c’est Laurent Wauquiez qui menace désormais de ne plus soutenir ce frais gouvernement. Qu’importe que Bayrou ait assouvi un fantasme de la droite : nommer deux de ses champions à l’Intérieur et à la Justice, Bruno Retailleau et Gérald Darmanin. Une preuve d’amour qui donnerait raison à François Mitterrand pour qui le centre n’était qu' »une variété molle de la droite. » Le Premier ministre s’est empressé de calmer les ardeurs d’une droite ivre : « Ce que Bruno Retailleau souhaite, ce n’est pas ma feuille de route ».De droite ou de gauche ? Et de l’une et de l’autre ? Ni de l’une ni de l’autre ? François Bayrou brouille et s’embrouille, un pas ici, un autre là et deux de côté. C’est le drame de cette vieille famille politique, comme le définissait Olivier Todd, l’ancien éditorialiste et rédacteur en chef de L’Express qui vient de nous quitter, à propos d’un autre centriste, Edgar Faure : « Vrai centriste, sa circonférence est partout et son centre nulle part. Il est au zénith d’un horizon assez bas. »



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Author : Olivier Pérou

Publish date : 2024-12-30 15:00:00

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