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« Les relations sociales les épuisent » : comment manager un introverti ?

« Les relations sociales les épuisent » : comment manager un introverti ?

Tellement discret qu’on en oublie parfois qu’il est là, l’introverti est, par nature, celui qui n’attire l’attention sur lui que pour être comparé aux autres, et parfois même durement dévalorisé. Dans un monde où, comme le soulignait Jean de la Fontaine, « la raison du plus fort est toujours la meilleure », cela rassure d’avoir un collègue effacé, qui n’a pas un avis sur tout. Incapable de se mettre en avant, il ne représente pas de danger pour la carrière des autres. Une déconsidération qui, à l’opposé, n’affecte pas les extravertis, car on les redoute tout en admirant leur aplomb et leur faconde. « Les introvertis comme les extravertis ont des traits de personnalité situés dans un continuum d’énergie, vers l’intérieur pour les premiers, vers l’extérieur pour les seconds. Toutefois, dans le monde de l’entreprise, l’extraversion est très valorisante. Son côté visible et expansif semble exprimer toutes les qualités du leadership. Les extravertis se rechargent au contact des autres et s’épanouissent notamment dans les métiers de commerciaux. A l’inverse, l’introverti, lui, va s’épuiser », analyse Marie-Victoire Chopin, docteure en psychologie.

L’introverti, souvent relégué au rôle de suppléant ou de doublure, est généralement perçu comme la « petite main ». A tort. « Une étude menée aux Etats-Unis a démontré que les leaders introvertis obtenaient de meilleurs résultats financiers lorsque leur équipe était proactive », souligne l’experte. « Ces personnalités, ajoute-t-elle, privilégient les petits groupes, les relations interpersonnelles. Elles ne sont pas directives, n’entravent pas la créativité. Elles approfondissent et réfléchissent. Elles prennent conseil auprès des autres, ce qui les conduits à commettre moins d’erreurs. Dans les conseils d’administration, on constate que les introvertis atteignent mieux leurs objectifs. » Celui qui a un introverti dans son équipe doit ainsi prendre conscience de la valeur ajoutée qu’il apporte. « On peut citer des qualités de créativité, de concentration, de modestie, d’écoute ainsi que la capacité à solliciter des avis pour prendre de meilleures décisions. Ils se remettent facilement en question car ils pratiquent déjà naturellement l’introspection », énonce la psychologue.

Le cas des « faux extravertis »

Toutefois, tous les introvertis ne se ressemblent pas. « Une introversion maladive peut résulter d’une anxiété sociale, d’une mauvaise estime de soi, d’une difficulté à gérer le stress, entraînant un repli sur soi. Ce trait peut aussi s’inscrire dans une pathologie plus importante », décrit Marie-Victoire Chopin. Aussi, cette dernière met ainsi en garde les managers contre la tentation de vouloir transformer ces personnes en quelqu’un qu’elles ne sont pas : « ils doivent comprendre que l’attitude de celui qui n’ose pas s’exprimer peut être la conséquence d’une exclusion socio-émotionnelle et d’une peur d’être incompris », précise-t-elle.

Il existe aussi des « faux extravertis ». Ils donnent l’impression de s’adapter facilement à leur environnement, mais en réalité, ils prennent beaucoup sur eux pour s’intégrer. « Les relations sociales les épuisent mentalement et physiquement et ils ont besoin de temps pour récupérer après les interactions », explique Marie-Victoire Chopin. Dans ce contexte, les open spaces, où il est difficile de s’isoler, peuvent poser problème car ces personnes-là ont besoin de recharger leur énergie. Si elles ne multiplient pas les soirées corporate, c’est qu’elles ont besoin de se reposer, là où les extravertis peuvent les enchaîner sans difficulté. Aussi, un bon management consiste aussi à les laisser, si besoin, prendre le large pour se ressourcer.

Certains secteurs sont-ils déconseillés aux introvertis ? Pas du tout, répond Marie-Victoire Chopin. Malgré les apparences, ils peuvent parfaitement travailler dans le domaine commercial, avec une dimension conseil expert et dans les relations en tête à tête. Dans la finance, on retient leur capacité de concentration ; en informatique, leur aptitude à détecter les failles et à résoudre les dysfonctionnements. Ils excellent par ailleurs en brainstorming, ont un grand sens du collectif et construisent des relations profondes. A une condition : penser l’organisation autour de leurs besoins. Privilégier les binômes, les trinômes. « Idéalement, il faut des équipes mixtes, à taille humaine, où ils peuvent trouver leur place », conclut-elle.



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Author : Claire Padych

Publish date : 2025-02-11 10:30:00

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