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Pourquoi il est important d’enseigner trois langues à chaque enfant

Pourquoi il est important d’enseigner trois langues à chaque enfant

Un lecteur m’a récemment écrit en m’accusant d’être « un adversaire de l’anglais ». J’en ai conclu que je ne m’exprimais pas assez clairement car je n’ai rien contre l’anglais, rien du tout. Je suis simplement peiné quand j’entends des francophones remplacer des mots français bien installés par des anglicismes qui, me semble-t-il, n’apportent rien. Je suis sans doute obtus, mais je ne parviens pas à comprendre pourquoi je devrais employer business à la place d’ »affaires », low cost à la place de « bon marché » ou ranking à la place de « classement »… Je ne mène donc pas un combat contre l’anglais ; je lutte en faveur de la diversité culturelle. Il se trouve que l’anglais est la langue qui domine aujourd’hui le monde ? C’est donc contre cette hégémonie que je mets en garde. Mais je tiendrais le même discours s’il s’agissait du japonais, de l’allemand, du wolof et même du gascon (même si, dans ce dernier cas, je reconnais que je devrais faire un petit effort…).

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Rappelons pour commencer cette vérité peu connue en France : chaque langue constitue une création de l’humanité, au même titre qu’une cathédrale, un livre ou une oeuvre musicale. On n’a pas à choisir entre Bach, Chopin et Scriabine (trilogie toute personnelle) ? De la même manière, on ne devrait pas avoir à choisir entre l’anglais, le français et les langues dites régionales. C’est pourquoi je reprends à mon compte cette idée défendue notamment par le linguiste Claude Hagège, consistant à apprendre trois langues à nos enfants, et cela dès la maternelle, voire la crèche.

Parmi ces trois langues figurerait en premier lieu le français, bien sûr, qui doit rester notre langue commune et ainsi assurer sa fonction de communication et de cohésion nationale.

Viendrait ensuite la langue de la région où l’on vit ou d’où l’on est originaire (là où il en existe une, évidemment), afin que nous puissions conserver la diversité qui fait la richesse de la France. Précisons. Dans une société désormais totalement francophone, cette langue devrait être privilégiée dans les premières années. Et cela pour une raison que chacun peut comprendre. Sachant que la vie éveillée d’un enfant est d’environ cent heures par semaine, il est bien évident que ce ne sont pas trois heures de basque qui suffiront à former un bon bascophone, pour prendre un exemple. Dans ce cas précis, le basque doit donc être utilisé de manière majoritaire de la maternelle au CE1 environ, avant que le français ne prenne une place croissante dans les enseignements.

Que les parents se rassurent ! Les enfants qui étudient une langue régionale de manière immersive sont parfaitement bilingues à la fin du CM2, toutes les expériences le prouvent. Selon les statistiques officielles du ministère de l’Education nationale, ils obtiennent même de meilleurs résultats en… français que les élèves monolingues. Et cela n’a rien de miraculeux : ce sont simplement là les vertus du bilinguisme précoce, désormais bien documentées par la science. « Un enfant peut apprendre plusieurs langues tout en parlant parfaitement le français. Et cela est vrai quelle que soit la langue« , précise la psycholinguiste Ranka Bijeljac-Babic (L’Enfant bilingue. De la petite enfance à l’école, Odile Jacob). Mieux : cela va l’aider à maîtriser « tous les problèmes qui demandent de l’attention et du contrôle, notamment les mathématiques », complète le neuropsychologue Albert Costa (Le Cerveau bilingue, Odile Jacob).

Quant à la troisième langue à enseigner à nos enfants à partir du collège, il doit s’agir d’une langue internationale. Ce sera le plus souvent l’anglais, bien sûr, mais pas toujours. A Strasbourg, il n’est pas stupide de choisir l’allemand ; à Toulouse, l’espagnol ; à Nice, l’italien, et ainsi de suite. Et l’on peut en être certain : les progrès des élèves seront fulgurants, tout simplement parce qu’un enfant qui parle deux langues a plus de facilités pour en apprendre une troisième, voire une quatrième.

Ainsi la France pourrait-elle tout à la fois préserver sa diversité culturelle, conforter son unité nationale et améliorer son ouverture sur le monde. Et cela d’autant plus facilement que les êtres humains sont naturellement capables d’être polyglottes.

Chiche ?

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Du côté de la langue française

Comment le vestiaire du PSG s’est remis à parler français

L’effectif du PSG a des allures de tour de Babel, avec des joueurs nés en Italie, en Russie, en Espagne, en Equateur, au Brésil, au Portugal, au Maroc, en Géorgie, en Corée et bien évidemment en France. Mais ce qui est nouveau cette saison, c’est que, cours à l’appui, tous ou presque parlent français, explique cet article du Parisien.

Un concours d’éloquence pas comme les autres

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Pourquoi le français est-il devenu une « matière haïe » en Suisse alémanique ?

Plusieurs cantons alémaniques remettent en question l’apprentissage du français à l’école primaire. Le linguiste Daniel Elmiger pense que le cœur du problème provient du manque de compétences et de motivation des enseignants, au point de transformer le français en « matière haïe ». Une évolution qui menace d’aggraver la fracture linguistique entre les Suisses romande et alémanique.

L’exception culturelle en Europe, cible des Etats-Uniens

Les représentants des studios, des réalisateurs et des techniciens du cinéma font allégeance à l’administration Trump, qui rêve de torpiller tout ce qui limite la domination des plateformes états-uniennes, souligne cet article du Monde.

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Mariage en catalan, mode d’emploi

L’association Perpinyà la Catalana dénonce le refus du maire RN de la ville, Louis Aliot, de célébrer des mariages bilingues catalan-français, rapporte L’Indépendant. Et diffuse un mode d’emploi pour procéder malgré tout à ce type de cérémonies.

Un nouveau dictionnaire pour le flamand occidental

2025 s’annonce comme un bon millésime pour le flamand occidental, souligne La Voix du Nord. D’une part, un Institut public de la langue flamande devrait voir le jour dans les prochains mois, sur le modèle de ce qui existe déjà pour le breton, le basque ou l’occitan. D’autre part, le Grand Dictionnaire du flamand occidental de France (Uutgeever Editeur/ANVT-IRLF) devrait être réédité dans une version enrichie, comprenant 814 pages et 22 % d’entrées supplémentaires.

Pétition pour les littératures en langues régionales à l’école : aidez-nous à franchir le cap des 20 000 signatures !

Cette pétition cherche à modifier le regard porté sur les langues minoritaires de France, souvent considérées par ignorance comme des « patois sans intérêt » et, ce faisant, à redonner leur dignité à leurs locuteurs. Elle a déjà recueilli un grand écho et a débouché sur une première rencontre avec Amin Maalouf, secrétaire perpétuel de l’Académie française, qui lui a apporté son soutien. Le collectif qui en est à l’origine (et dont je fais partie) lui présentera le 3 juin un florilège de textes littéraires en plusieurs langues de France, dont les langues d’Outre-Mer. Nous aimerions, pour cette occasion, franchir le cap des 20 000 signatures. Vous pouvez nous y aider en ajoutant votre signature et en faisant circuler cet appel autour de vous. Merci !

Participez aux rencontres de Salinelles

Une nouvelle édition des rencontres de Salinelles, dédiées à la littérature et à la création en langue d’oc, se tiendra du 16 au 18 mai dans cette commune du Gard. Au programme : salon du livre, lectures, spectacles, concert et… siestes poétiques.

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Faut-il parler italien pour devenir pape ?

Ne pas maîtriser l’italien semble constituer un handicap pour qui veut être pape, souligne sur LinkedIn Arnaud Besnier, traducteur passionné par la linguistique. Non seulement le chef de l’Eglise catholique est aussi évêque de Rome, mais l’italien est la première langue de travail du Vatican, à côté du latin (langue religieuse et juridique), du français (langue de la diplomatie) et de l’allemand (langue de la garde suisse pontificale).

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« Rien » veut dire « quelque chose » !

C’est ce que rappelle dans ce podcast très clair l’académicienne Barbara Cassin dans l’émission de RFI, Un mot, une histoire. Raymond Devos à l’appui !

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Saisissant ! Regardez la vidéo étonnante de cette députée maorie lançant la danse rituelle de son peuple au sein du Parlement néo-zélandais. Une manière de s’opposer à une proposition de loi qui, selon elle, réinterprète le texte fondateur de la nation néo-zélandaise au détriment des Maoris.

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Author : Michel Feltin-Palas

Publish date : 2025-05-06 04:15:00

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