Après les quelque 1 500 assaillants du Capitole en janvier, une nouvelle vague de personnes a bénéficié ces derniers jours de la grâce présidentielle de Donald Trump. Au total, le président américain a offert son pardon à plus de deux douzaines de personnes accueillies par sa base de droite ou favorisées par les gens dans son orbite, rapporte The New York Times. Il a ainsi annoncé mardi vouloir gracier deux vedettes de téléréalité condamnées pour fraude fiscale et bancaire en 2022 et emprisonnées en janvier 2023. Il s’agit de Todd et Julie Chrisley, connus pour une émission consacrée à leurs vies de multimillionnaires en Géorgie (sud), intitulée « Chrisley Knows Best », lancée en 2014 sur la chaîne USA Network.
« Vos parents vont être libres et blanchis et nous espérons que ce sera fait demain », a dit le républicain de 78 ans pendant un coup de fil à la fille des deux personnalités, selon une vidéo diffusée sur X par une conseillère de la Maison-Banche, Margo Martin. « Ils ont été traités durement, d’après ce que j’entends », a-t-il encore dit dans cette conversation avec Savannah Chrisley, une partisane déclarée de Donald Trump.
Redéfinir la criminalité
Selon l’agence Associated Press, un rappeur connu sous le nom de NBA YoungBoy, Kentrell Gaulden de son vrai nom, condamné à un peu moins de deux ans de prison pour des accusations liées aux armes à feu, fait également partie des graciés par le président Donald Trump. « Je tiens à remercier le président Trump de m’avoir accordé une grâce et de m’avoir donné l’opportunité de continuer à construire – en tant qu’homme, en tant que père et en tant qu’artiste », a déclaré NBA YoungBoy dans un communiqué publié en ligne.
Selon le New York Times, le milliardaire a aussi usé de son pouvoir de grâce en faveur de Paul Walczak, un gestionnaire de maisons de retraite qui avait plaidé coupable en novembre dernier de fraude fiscale à grande échelle. Le grand quotidien note que la mère de cet homme a contribué très activement à la campagne électorale du président américain, et a en particulier participé le mois dernier à un dîner dans la résidence de Floride du président républicain, dont les invités devaient s’acquitter d’un droit d’entrée d’un million de dollars par personne.
Mercredi, Donald Trump a encore gracié près de 17 personnes de plus et commué les peines de huit autres. « Bon nombre de ces bénéficiaires semblaient être des partisans ou des cibles d’enquêtes sur la corruption politique », note The Washington Post. Lundi, le haut fonctionnaire chargé d’orchestrer les grâces présidentielles, Ed Martin, donnait d’ailleurs le ton en écrivant sur X « No MAGA left behind » (« Aucun MAGA laissé-pour-compte », en français), suggérant par la même occasion que le ministère devrait enquêter sur les adversaires de Donald Trump pour les humilier s’il n’y avait pas suffisamment de preuves pour les inculper.
Le président Trump, lui-même condamné pour des malversations financières, « utilise l’immense pouvoir de son bureau pour redéfinir la criminalité en fonction de ses besoins », observe le New York Times. Et d’ajouter : « Il se sert des pardons pour inoculer les criminels qu’il aime, minimise les crimes de corruption et de fraude et cherche à stigmatiser les opposants politiques en les qualifiant de criminels ». « L’octroi d’une réhabilitation ou la commutation de peines à des fonctionnaires ou à d’autres criminels en col blanc reconnus coupables de fraude, d’évasion fiscale et d’autres abus de confiance aura probablement pour effet de normaliser les crimes non violents », a déclaré auprès du quotidien Barbara L. McQuade, professeure de droit de l’Université du Michigan et procureure des États-Unis sous l’administration Obama.
Dans un éditorial, le Washington Post ne dit pas autre chose. « Cette vague de pardons sape l’état de droit, annule le jugement des jurys et envoie un message fort que les États-Unis ont un système judiciaire à deux niveaux – dans lequel les personnes politiquement connectées sont tenues à des normes inférieures à celles des autres », avance le quotidien.
Instrumentalisation de la justice
Au départ, Donald Trump voulait nommer l’ultraconservateur Ed Martin au poste stratégique de procureur de Washington, mais avait dû renoncer après des révélations sur les liens de son protégé avec des assaillants du Capitole, dont un sympathisant nazi déclaré, et son omission d’apparitions fréquentes dans des médias russes pendant des années. Le président républicain a toutefois décidé de confier à Ed Martin un poste non moins sensible, celui de « directeur du groupe de travail sur l’instrumentalisation de la justice ». Cette notion d' »instrumentalisation de la justice » est centrale dans la rhétorique de Donald Trump, qui accuse l’ancienne administration démocrate d’avoir utilisé le système judiciaire contre lui.
Cette semaine, Donald Trump a par ailleurs justifié la grâce accordée à Scott Jenkins, ancien shérif du comté de Culpeper (Virginie) et allié politique condamné à 10 ans de prison pour corruption, en disant qu’il avait été « traîné en enfer par un ministère de la Justice corrompu et armé » sous l’administration Biden. En réalité, Scott Jenkins a été reconnu coupable d’avoir touché 75 000 dollars de pots-de-vin, preuves à l’appui, auprès de plusieurs hommes d’affaires en échange de leur nomination comme sous-shérifs auxiliaires dans son ministère. Ces grâces font suite à un effort systématique au sein du ministère de la Justice pour démanteler les unités qui enquêtent sur la corruption publique, la fraude et l’ingérence étrangère dans les affaires et les élections américaines, conclut le New York Times.
Source link : https://www.lexpress.fr/monde/amerique/donald-trump-multiplie-les-graces-presidentielles-et-ses-choix-sont-loin-detre-anodins-SYXXR76S6VFI5PU4HH6K7MNV5Y/
Author : Célia Cuordifede
Publish date : 2025-06-01 16:12:00
Copyright for syndicated content belongs to the linked Source.