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Détention d’armes blanches par des mineurs : les pistes du gouvernement face à un phénomène en expansion

Détention d’armes blanches par des mineurs : les pistes du gouvernement face à un phénomène en expansion

Des affrontements entre bandes rivales au « déferlement de violence insensé » décrit par Emmanuel Macron après le meurtre d’une surveillante poignardée ce mardi 10 juin à l’entrée d’un collège en Haute-Marne, la problématique du port d’armes blanches chez les mineurs est prégnante ces derniers mois. Ces derniers mois, le gouvernement a envisagé plusieurs plans pour endiguer ce phénomène, alors que les signalements d’armes blanches dans les établissements scolaires ont bondi de 15 % en un an, selon des chiffres officiels publiés en février.

Le Premier ministre François Bayrou a voulu marquer le coup ce mardi au 20 Heures de TF1, et annoncé plusieurs mesures : interdiction « tout de suite » de la vente des couteaux aux mineurs et expérimentation des portiques de détection d’armes à l’entrée des établissements. Et le président de la République de renchérir à peine quelques minutes plus tard : « un jeune de quinze ans ne pourra plus acheter un couteau sur Internet ».

Les précédentes gressions mortelles

Le 31 mai à Dax (Landes), en marge du sacre européen du PSG, un mineur est touché de plusieurs coups de couteau portés au thorax, et succombera. L’agresseur présumé a 16 ans, et un vol de casquette est potentiellement à l’origine du contentieux.

En mars, c’est une lycéenne qui a été mortellement poignardée dans un établissement privé de Nantes. Le suspect, un élève, a été interpellé dans la foulée.

Quelques mois plus tôt, fin janvier, Elias, collégien de 14 ans, mourait après avoir été agressé à la sortie d’un entraînement de football pour avoir résisté au vol de son portable. L’un des deux adolescents mis en examen a reconnu l’avoir poignardé avec « une lame ‘zombie killer' », une « machette coupecoupe » dotée d’une lame de 44,5 cm, achetée sur internet, selon une source proche du dossier.

Ce que prévoit la loi

Les armes blanches sont classées en catégorie D, celle regroupant « les objets pouvant constituer une arme dangereuse pour la sécurité publique » (poignard, couteau-poignard, matraque, etc).

L’acquisition et la détention d’armes toutes catégories confondues sont interdites aux mineurs, à de rares exceptions près comme pour les chasseurs de plus de 16 ans ou pour les mineurs, en fonction de leur âge, détenteurs d’une licence de la Fédération française de tir, du ball-trap ou de biathlon.

Les pistes envisagées

En mars, après une rixe mortelle devant un lycée en Essonne, les ministres de l’Education Elisabeth Borne et de l’Intérieur Bruno Retailleau avaient appelé préfets et recteurs d’académie à mener « des contrôles aléatoires aux abords des établissements scolaires ». Entre le 26 mars et le 26 mai, quelque 6 000 contrôles de sacs ont été effectués au niveau national. L’opération s’est soldée par 186 couteaux saisis et 32 gardes à vue, selon Beauvau.

En avril, c’est le Premier ministre qui a exigé que « des propositions concrètes en matière de prévention, de réglementation et de répression, lui soient soumises sous quatre semaines ». François Bayrou doit prochainement rendre des arbitrages après la remise d’un rapport sur la détention d’armes blanches rédigé par la vice-présidente Horizons de l’Assemblée nationale, Naïma Moutchou. Selon cette dernière, « n’importe quel territoire aujourd’hui est concerné », et il n’existe « pas un profil » d’agresseur type. La députée préconise le déploiement obligatoire de la vidéosurveillance devant et dans les enceintes scolaires.

François Bayrou a souhaité ce mardi que le gouvernement travaille à « l’expérimentation » de portiques de détection d’armes à l’entrée des établissements. Mais le patron du parti macroniste Renaissance, Gabriel Attal, a dans la foulée, sur BFMTV, exprimé son scepticisme, en notant que ces portiques ne permettraient « absolument pas d’empêcher » l’introduction d’une arme blanche dans un établissement. Quant aux détecteurs de métaux, « j’ai un peu peur de la fausse bonne idée ». « Un collège, vous avez en moyenne 500 ou 600 élèves. Vous imaginez, ils arrivent tous à la même heure, ça fait des attroupements (…) à un moment où, avec le risque terroriste, on veut au contraire les limiter devant les établissements », a poursuivi l’ancien Premier ministre. Edouard Philippe s’est également montré dubitatif à propos des portiques : « Je ne suis pas sûr que ça soit le bon message », a-t-il lancé sur TMC.

Mis en cause, notamment par Marine Le Pen, pour avoir évoqué il y a quelques jours ceux qui « opèrent un ‘lavage de cerveau’ sur les dernier faits divers », Emmanuel Macron s’est défendu, se plaçant aux côtés des victimes, mais appelant à « une forme de discipline collective » en s’attaquant « aux causes profondes ». Dans la soirée, le chef de l’Etat a promis de « durcir les règles » : « Ça veut dire qu’on va mettre des sanctions massives, financières, des interdictions. On ne pourra plus vendre ces armes blanches ». Et Emmanuel Macron de poursuivre en pointant à nouveau la responsabilité des réseaux sociaux, dont il ambitionne de les interdire au moins de 15 ans : « Je nous donne quelques mois pour arriver à faire la mobilisation européenne. Sinon (…) on commence à le faire en France. On ne peut pas attendre ».

Plan couteaux Paris

Début mars, un plan de prévention contre le port des armes blanches chez les mineurs dans l’agglomération parisienne a été présenté par la Ville, la préfecture de police, le parquet et le rectorat de Paris. Il s’articule autour des établissements scolaires et des armureries. Si dans l’agglomération parisienne, le nombre de mineurs mis en cause dans les infractions de port et transport d’arme prohibé de catégorie D est en constante diminution depuis deux ans, Paris voit le nombre de mineurs mis en cause augmenter : +20 faits entre 2022 et 2024.

Le préfet de police Laurent Nuñez avait mis en exergue le « nombre d’armes blanches saisies en 2024 par les services de police de l’agglomération parisienne: 6 500, contre 6 000 » en 2023. « Le phénomène des rixes entre jeunes », est l’autre point noir qu’il avait souligné, avec un « âge moyen qui ne cesse de baisser » parmi les adolescents concernés, passant de 17 ans l’année dernière à 16 ans cette année.

Problème européen

En Angleterre et au Pays de Galles, les actes de délinquance impliquant l’usage d’une arme blanche connaissent une hausse constante depuis 2011, selon le gouvernement. Ils ont augmenté de plus de 40 % sur cette période. Dix adolescents ont péri dans des attaques au couteau l’année dernière à Londres, selon la police, dix-huit en 2023. Au cœur de ces drames, parfois des guerres de territoires liées au trafic de drogue, parfois des insultes ou même une erreur d’identité.

En Suisse, une campagne a été menée en 2023 auprès des adolescents, et en Espagne, les autorités catalanes en particulier s’emparent aussi du sujet.

Chaque année, au niveau mondial, environ 193 000 homicides impliquant des jeunes âgés de 15 à 29 ans ont lieu, soit 40 % du nombre total d’homicides, selon l’OMS.



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Author : Yohan Blavignat

Publish date : 2025-06-10 20:24:00

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