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Droits de douane : jusqu’à 45 000 emplois menacés en France par la guerre commerciale de Donald Trump

Droits de douane : jusqu’à 45 000 emplois menacés en France par la guerre commerciale de Donald Trump

La France risque de perdre 2,5 milliards d’euros d’exportations, et plus de 45 000 emplois dans les secteurs du vin et du luxe. Ce scénario catastrophe, exposé par le cabinet d’étude économiste Asterès dans une note publiée le 22 juin, pourrait être le résultat bien réel de la politique de hausse des tarifs douaniers de Donald Trump, si l’Union européenne ne parvient pas à obtenir la paix commerciale avec les Etats-Unis d’ici la fin de la pause tarifaire, fixée au 9 juillet.

Avec le secteur des cosmétiques et de la maroquinerie (cuir, bagages, chaussures), le secteur viticole et ses 3,7 milliards d’euros d’exportations annuelles vers les Etats-Unis pourrait être « le plus durement touché », avec jusqu’à 14 000 emplois menacés, dont 3 600 emplois directs, selon la note.

Des scénarios « prudents »

Deux scénarios sont envisagés par la note. Dans le pire des cas (dont les conséquences sont exposées plus haut) les droits de douane américains sur ces produits sont augmentés à 50 % par l’administration Trump. Dans l’autre scénario, les droits de douane atteignent seulement 20 %, provoquant 1 milliard d’euros de pertes en exportations et la disparition d’environ 17 000 emplois.

Les économistes d’Asterès — cabinet d’étude du chroniqueur de L’Express Nicolas Bouzou — « soulignent que ces estimations sont prudentes, fondées sur des hypothèses conservatrices d’élasticité prix et de maintien de l’offre. Dans la réalité, les comportements d’achat des consommateurs et des distributeurs pourraient amplifier les effets négatifs ».

Pour compenser les effets dévastateurs sur leurs entreprises, certains grands patrons du luxe préviennent déjà. « On n’ajuste pas notre politique industrielle avec les droits de douane. Quand ils augmenteront, on augmentera nos prix », a par exemple déclaré Axel Dumas, gérant d’Hermès, mi-février lors de la présentation de ses résultats annuels. Même son de cloche chez LVMH. « Nous envisageons des mesures d’ajustement des prix en cas de hausse des droits de douane américains », a indiqué aux Echos le directeur général adjoint Stéphane Bianchi.

Abandonner la logique d’escalade

Pour éviter un scénario aux dégâts catastrophiques sur l’économie et les emplois français, Asterès fait plusieurs recommandations. D’abord, l’abandon d’une logique d’escalade commerciale : c’est-à-dire, arrêter de répliquer par une augmentation en miroir des droits de douane imposés par Donald Trump. Pour l’heure, la tendance est pourtant à la stratégie « œil pour œil, dent pour dent ».

En mars dernier, Washington a annoncé des droits de douane de 25 % sur l’acier et l’aluminium européens, déclenchant une vive réaction de Paris qui a dénoncé des mesures « brutales » et agité la menace de représailles. En réponse, l’UE a préparé des représailles sur 26 milliards d’euros de produits américains. Ce à quoi Donald Trump a répliqué avec une augmentation générale à 20 % des droits de douane pour l’UE, menaçant aussi d’imposer une surtaxe de 200 % sur le vin et les spiritueux français. Bruxelles a adopté des contre-mesures à hauteur de 21 milliards d’euros le 9 avril dernier, poussant Donald Trump à annoncer une hausse finale à 50 % des tarifs sur tous les produits européens.

Un échange téléphonique entre le président des Etats-Unis et Ursula von der Leyen a finalement permis une trêve dans la guerre commerciale et une suspension des augmentations tarifaires jusqu’au 9 juillet, laissant aux deux continents le temps de négocier. Mais Donald Trump a d’ores et déjà écarté la possibilité d’un accord « zéro pour zéro » comme l’avait proposé la présidente de la Commission européenne en avril, et les tensions restent vives.

Investir dans la résilience des filières

Dans le scénario le moins menaçant – une hausse à 20 % des droits de douane — l’industrie cosmétique subirait une baisse de 10 % des exportations entraînant la suppression de plus de 5 000 emplois. Le secteur du vin lui perdrait 11 % de ses exportations (soit 8 000 emplois supprimés) et celui de la maroquinerie près de 10 % (soit 3 900 emplois en moins). Dans le cas d’un scénario à 50 % de droits de douane, ces chiffres triplent.

Dans cette perspective, une autre mesure est recommandée par les économistes pour nuancer l’effet de la politique Trump : la mise en place d’une « stratégie de soutien aux secteurs exposés et une diversification des débouchés commerciaux, plutôt que l’adoption de mesures de représailles ». Et ce notamment à travers la recherche de nouveaux partenaires, mais aussi le renforcement de la coopération avec les partenaires historiques. Face à l’urgence de cette politique commerciale américaine offensive, « l’Europe aurait davantage à gagner en investissant dans la résilience de ses filières exportatrices qu’en s’engageant dans une guerre commerciale aux effets délétères », tranche la note.



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Author : Enola Richet

Publish date : 2025-06-30 17:43:00

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