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À Rio, des Brics fracturés cherchent à renforcer leur influence face à l’Occident affaibli

À Rio, des Brics fracturés cherchent à renforcer leur influence face à l’Occident affaibli

Dimanche 6 et lundi 7 juillet, les « Brics+ « , ce club de pays émergents formé il y a une quinzaine d’années, tiennent leur sommet annuel à Rio. Formé à l’origine autour du Brésil, de la Russie, de l’Inde, de la Chine et de l’Afrique du Sud, il réunit aujourd’hui dix membres permanents — dont l’Arabie saoudite, ou encore l’Iran. Ils représentent à eux seuls près de la moitié de la population mondiale et 40 % du PIB mondial, soit davantage que les pays du G7.

Lors de ce sommet, qui sera présidé par le Brésil de Luiz Inacio Lula da Silva, une ambition commune transparaît, malgré des dissensions internes : peser dans la géopolitique mondiale et proposer une alternative face à l’ordre économique mondial imposé par l’Occident, plus que jamais fracturé et rongé par son implication dans des guerres militaires et commerciales.

Créé dans le but de rééquilibrer l’ordre mondial au bénéfice du « Sud global » face à l’Occident, le groupe des Brics+ s’est largement élargi ces deux dernières années, et devrait bientôt accueillir officiellement l’Indonésie et l’Argentine. En tout, huit pays supplémentaires, aujourd’hui « partenaires », sont candidats à l’adhésion. Contrairement à l’Otan, où la coopération militaire est centrale, le groupe se concentre sur un agenda économique et géopolitique, « même s’il a eu du mal à faire des progrès significatifs sur bon nombre de ses objectifs concrets, servant jusqu’à présent d’alliance essentiellement symbolique », détaille le New York Times.

« Réformer l’architecture financière mondiale »

Durant ce sommet, les Brics exprimeront notamment leurs « graves préoccupations » face aux droits de douane « unilatéraux » imposés par les Etats-Unis depuis le retour au pouvoir de Donald Trump. De telles mesures douanières « menacent de réduire davantage le commerce mondial » et pourraient « affecter les perspectives de développement économique dans le monde », affirme la déclaration provisoire. « Face à la résurgence du protectionnisme, il appartient aux nations émergentes de défendre le régime commercial multilatéral et de réformer l’architecture financière internationale » a d’ores et déjà réagi le président Lula.

Pour aller dans ce sens, la Nouvelle Banque de développement des Brics+ avait été créée en 2014 avec l’ambition d’arracher au dollar son rôle de monnaie d’échange internationale incontournable. Mais aujourd’hui encore, « l’abandon du dollar et la promotion d’une monnaie alternative – le yuan – seraient un vrai coup de semonce envers l’ordre économique actuel et la domination de Washington […] En pleine guerre des taxes douanières, la plupart des membres, Chine comprise, cherchent à apaiser les Etats-Unis plutôt qu’à ouvrir un nouveau front », analyse le quotidien économique suisse Le Temps.

L’Iran vient chercher de nouveaux alliés

Dans le grand échiquier géopolitique international, « la plateforme des Brics+ apparaît par contre de plus en plus comme un levier de négociation avec les Etats-Unis et les Européens », souligne le Temps à l’approche de ce nouveau sommet. Depuis 2022, l’Arabie saoudite comme Ankara ont joué un rôle majeur dans les différentes étapes des négociations pour la mise en place de cessez-le-feu en Ukraine. La Turquie, qui fait partie de l’OTAN — l’Alliance militaire et qui unit les pays du Nord de l’Atlantique — pourrait d’ailleurs être la première à rallier également ce club élargit du « Sud ».

Dans les semaines à venir, l’alliance du Sud pourrait de nouveau peser sur la scène géopolitique mondiale : les analystes s’attendent à ce que l’Iran (pays membre des Brics) utilise le sommet qui se déroule aujourd’hui et demain comme une opportunité pour renforcer le soutien du groupe, notamment à travers un communiqué qui devrait être publié à la fin de la réunion. Alors que le sujet divisait les délégations, les négociateurs sont aussi parvenus samedi à un consensus sur la façon d’évoquer l’escalade militaire au Moyen-Orient, selon une source de l’AFP.

L’Iran souhaite que ses alliés durcissent le ton alors que le pays sort d’une guerre de douze jours avec Israël et les Etats-Unis et Israël. Son président Massoud Pezeshkian ne participera d’ailleurs pas au sommet. « Dans les coulisses, les divisions sur la sévérité avec laquelle les Brics devraient condamner les frappes ont mis à l’épreuve les ambitions de l’alliance de rééquilibrer la dynamique du pouvoir mondial en offrant un contrepoids à l’Occident », relate le New York Times.

Finalement, les Brics devraient conserver dans cette nouvelle déclaration « le même langage » que celle faite fin juin à ce sujet par le groupe, selon la même source de l’AFP. Les pays émergents avaient alors condamné les « attaques militaires » contre l’Iran – mais sans citer Israël et les Etats-Unis – et jugé « urgent de rompre le cycle de la violence et de rétablir la paix ».

Les Brics+ grandissent mais se divisent

Aucune déclaration politique très forte n’est attendue de ce sommet. Notamment parce que les deux leaders du front « anti-occidental », le Président chinois et le Russe Vladimir Poutine (toujours sous mandat d’arrêt international), seront absents. S’ils sont les plus véhéments à l’égard de l’Occident, la Chine et la Russie poussent du même temps constamment pour l’agrandissement du groupe, rendant plus difficile le fait de parvenir à un consensus.

Malgré le fait que son poids ne cesse d’augmenter, une fracture continue de grandir au sein de Brics+, en particulier depuis le début de la guerre en Ukraine. D’un côté les deux pays fondateurs voient les Brics comme un moyen de défier l’influence des États-Unis sur la géopolitique et la prise de décision. De l’autre, un autre bloc porté par le Brésil et l’Inde, veulent résister à ces pressions en tentant de faire de l’Alliance un moyen de donner plus de poids au pays en développement.



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Publish date : 2025-07-06 09:34:00

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