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L’Allemagne se veut chef de file d’une nouvelle politique d’immigration européenne

L’Allemagne se veut chef de file d’une nouvelle politique d’immigration européenne

Nouveau signal du durcissement de la politique migratoire opéré par le chancelier conservateur Friedrich Merz, le gouvernement allemand a expulsé vendredi 18 juillet 81 Afghans condamnés par la justice. L’initiative a aussitôt été dénoncée par l’ONU, qui a demandé « l’arrêt immédiat du renvoi forcé de tous les réfugiés et demandeurs d’asile afghans ». Depuis son arrivée au pouvoir, Friedrich Merz semble vouloir se placer en tête d’une file de dirigeants européens qui veulent restreindre l’accueil des demandeurs d’asile, tandis que l’extrême droite gagne du terrain à travers le continent.

Il s’agit de la seconde opération de ce type depuis l’été dernier, la première depuis l’entrée en fonction de la coalition entre conservateurs et sociaux-démocrates dirigée par Friedrich Merz. Des expulsions d’autant plus controversées compte tenu du retour au pouvoir des talibans en août 2021. Le Haut-Commissaire de l’ONU aux droits humains Volker Türk a d’ores et déjà réagi en soulignant que certains Afghans expulsés risquaient « d’être persécutés » dans leur pays. « Expulser des personnes vers des pays dangereux comme l’Afghanistan et diaboliser les réfugiés est l’expression d’un programme autoritaire qui a malheureusement également trouvé son chemin en Allemagne », a abondé Amnesty International.

« Berlin coopère avec des terroristes »

L’opération menée vendredi a pu se dérouler grâce à l’entremise du Qatar. Mais Berlin avait indiqué récemment vouloir négocier directement avec les autorités talibanes. « Ces discussions devront avoir lieu », a annoncé le ministre allemand de l’intérieur Alexander Dobrindt. Berlin « coopère avec un régime terroriste », a fustigé une députée du parti d’opposition de gauche radicale Die Linke, Clara Bünger. L’Allemagne souhaite également pouvoir procéder à des expulsions vers la Syrie. Au cours des dernières semaines, la coalition de Friedrich Merz a décidé le refoulement des demandeurs d’asile aux frontières du pays et modifié la législation afin de limiter le regroupement familial pour certaines catégories de réfugiés et d’allonger les délais d’accès à la nationalité allemande.

La première économie européenne a accueilli plus d’un million de réfugiés, dont de très nombreux Syriens et Afghans, lors de la crise migratoire des années 2015-2016, sous le mandat de l’ex-chancelière Angela Merkel. Depuis, les gouvernements qui ont suivi ont refermé la page de cette politique d’accueil, et le thème de l’immigration est plus que jamais cœur des débats politiques dans une Allemagne marquée par une progression sans précédent de l’extrême droite aux législatives de février dernier.

En quelques mois au pouvoir, la coalition de Friedrich Merz a notamment décidé le refoulement des demandeurs d’asile aux frontières du pays et modifié la législation afin de limiter le regroupement familial pour certaines catégories de réfugiés et d’allonger les délais d’accès à la nationalité allemande.

Leadeuse d’une politique stricte d’immigration en Europe

Comme une illustration de la dureté allemande à venir sur les questions migratoires, cette opération d’expulsion a été annoncée le même jour où le gouvernement allemand accueillait, dans le sud du pays, les ministres de l’Intérieur de cinq pays de l’UE, eux aussi désireux de durcir leurs politiques d’immigration. Le ministre de l’intérieur Alexander Dobrindt y a donc reçu ses homologues polonais, français, autrichien, tchèque et danois – le Danemark occupe la présidence tournante de l’UE – ainsi que le commissaire européen chargé de la Migration, Magnus Brunner.

Objectif affiché pour ce sommet : « donner un élan à une politique européenne plus stricte en matière d’immigration » et porter de nouvelles idées à Bruxelles pour « durcir la politique d’asile ». Dans leur déclaration commune, les participants prônent une série de « nouvelles solutions », comme la facilitation des expulsions de demandeurs d’asile déboutés vers des pays autres que ceux d’origine. Actuellement restreinte, cette option pourrait être étendue via ce que Magnus Brunner nomme une « diplomatie migratoire ». « Nous voulons créer la possibilité de renvoyer les migrants dans des pays voisins proches de leur pays d’origine » lorsque ce dernier refuse de reprendre ses ressortissants, a ajouté Alexander Dobrindt devant ses homologues européens.

Refouler des migrants aux frontières franco-allemandes ?

« L’Allemagne n’appuie plus sur le frein mais est assise au volant de la locomotive européenne sur le dossier migratoire » a conclu le ministre, comme le rapporte Le Temps dans l’article de sa correspondante berlinoise. Et il n’est pas la seule figure forte européenne à vouloir accélérer. Le gouvernement allemand semble effectivement avoir trouvé un allié solide chez son homologue d’outre-Rhin, le ministre de l’intérieur français Bruno Retailleau.

Le journal national allemand le Frankfurter Allgemeine Zeitung raconte récemment une rencontre secrète en tête à tête entre les deux hommes, pour un dîner dans un restaurant au cœur de Berlin. Durant la conférence de presse qui a suivi leur rencontre, les deux hommes ont été jusqu’à évoquer un nouvel accord pour succéder à celui de Mondorf conclu en 1997, qui pourrait être utilisé comme fondement légal pour mettre en place le refoulement des migrants aux frontières franco-allemandes.



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Publish date : 2025-07-19 13:46:00

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