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Nucléaire iranien : le « snapback », cette arme que l’Europe menace d’utiliser contre l’Iran

Nucléaire iranien : le « snapback », cette arme que l’Europe menace d’utiliser contre l’Iran

L’avertissement est clair et sans précédent depuis plusieurs années : Paris, Berlin et Londres ont menacé jeudi dernier de réactiver les sanctions de l’ONU contre l’Iran si aucune avancée diplomatique n’est obtenue dans les prochaines semaines sur le dossier nucléaire. Cette mise en garde intervient dans un climat de très fortes tensions régionales, marqué par les frappes israéliennes et américaines de juin contre des sites nucléaires iraniens. Depuis, les discussions, déjà fragiles, sont à l’arrêt. Mais des pourparlers sont prévus vendredi à Istanbul entre l’Iran, la France, le Royaume-Uni et l’Allemagne.

Les Européens espèrent éviter une escalade et rappellent leur objectif : convaincre Téhéran de reprendre la voie des négociations afin d’aboutir à un accord « robuste, vérifiable et durable ». Mais le temps presse. L’Express fait le point sur ces sanctions qui planent sur l’Iran.

Aucune contestation possible

Le mécanisme de « snapback » est au cœur de l’accord historique conclu à Vienne en 2015, également connu sous le nom de JCPOA (Joint Comprehensive Plan of Action). À l’époque, l’Iran s’engage à limiter drastiquement son programme nucléaire en échange d’une levée progressive des sanctions économiques et diplomatiques qui l’isolent sur la scène internationale. Ce compromis est alors inscrit dans la résolution 2231 du Conseil de sécurité de l’ONU.

Mais pour rassurer les signataires, une clause dite de sauvegarde est ajoutée : en cas de manquement notable de Téhéran, toutes les sanctions antérieures peuvent être rétablies automatiquement, sans que la Russie ou la Chine, alliées de l’Iran, puissent y mettre leur veto. Concrètement, un État participant à l’accord (France, Royaume-Uni, Allemagne, Chine ou Russie) peut adresser une notification officielle au Conseil de sécurité pour dénoncer un « non-respect notable d’engagements d’un autre participant ». Dès lors, un compte à rebours de 30 jours s’enclenche : soit le Conseil de sécurité vote une nouvelle résolution confirmant la levée des sanctions, soit l’État plaignant oppose son veto, et les sanctions reviennent automatiquement en vigueur.

Le spectre du « snapback » est redoutable pour Téhéran, car il impliquerait un retour immédiat à toutes les sanctions internationales levées en 2015 : embargo mondial sur les armes, interdiction de transférer des équipements nucléaires, restrictions sur le secteur bancaire et les assurances. Comme l’a résumé Jean-Noël Barrot, ministre français des Affaires étrangères, samedi 12 juillet sur LCI : « Si l’Iran […] se refuse à négocier un encadrement strict et durable de son programme nucléaire, alors la France, avec ses partenaires européens, peut, par une simple lettre à la poste, réappliquer à l’Iran l’embargo mondial sur les armes, sur les équipements nucléaires et sur les banques et assurances, qui avait été levé il y a 10 ans ».

Pour l’Europe, c’est un dernier recours diplomatique, pensé comme un moyen de contraindre l’Iran à revenir à la table des négociations avant l’expiration du JCPOA en octobre prochain.

Une pression jugée « illégitime » par l’Iran

Mais les Européens espèrent ne pas avoir besoin de recourir au snapback et pouvoir encore sauver la diplomatie. Ils ont réitéré leur volonté de convaincre Téhéran de reprendre des discussions « sans délai » pour parvenir à un accord » robuste et vérifiable ». Une nouvelle réunion avec les négociateurs iraniens est prévue vendredi, la première depuis les bombardements.

Depuis le mois de juin, la situation s’est détériorée après les frappes israéliennes contre l’Iran, soutenues par les États-Unis. Ces attaques ont détruit plusieurs sites liés au programme nucléaire et ont tué des personnalités-clés du complexe militaro-scientifique iranien. Washington avait, de son côté, également frappé trois installations nucléaires dans la nuit du 21 au 22 juin, marquant une escalade majeure.

De son côté, l’Iran dénonce des pressions jugées « illégitimes ». Le ministre des Affaires étrangères Abbas Araghchi a déclaré sur son compte X que « les Européens n’ont aucun fondement moral ou juridique » pour activer le snapback, les accusant même d’avoir perdu leur statut de « participants » à l’accord en soutenant Israël et les États-Unis.

Téhéran rejette également les accusations occidentales selon lesquelles son programme aurait des visées militaires. Pourtant, l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) tirait la sonnette d’alarme juste avant que la guerre avec Israël n’éclate : avant les frappes israéliennes et américaines sur ses installations, l’Iran était accusée d’enrichir de l’uranium à 60 %, très au-delà des 3,67 % autorisés par l’accord de 2015. Un seuil qui le rapproche dangereusement des 90 % nécessaires à un usage militaire et qui n’a « aucune justification civile », selon l’AIEA.



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Author : Aurore Maubian

Publish date : 2025-07-21 14:33:00

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