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Sommet Trump-Poutine en Alaska : le partage de l’Arctique, l’autre « deal » en jeu ?

Sommet Trump-Poutine en Alaska : le partage de l’Arctique, l’autre « deal » en jeu ?

Ce sommet devait marquer un tournant dans la guerre en Ukraine, voire même permettre d’enfin décrocher un cessez-le-feu. Pourtant, à la sortie des négociations entre le président russe Vladimir Poutine et son homologue américain Donald Trump, vendredi 15 août, à Anchorage (Alaska), c’est l’effet pschitt. Aucune annonce majeure n’a été faite : pas de pause dans les combats, mais seulement la promesse de « progrès » dans les négociations. Les dirigeants n’ont donné que très peu de détails sur les discussions, ce qui laisse certains observateurs penser que le vrai « deal » pourrait se jouer ailleurs. A commencer par la résolution des tensions dans l’Arctique, territoire convoité par les grandes puissances, dont les Etats-Unis et la Russie.

Le lieu de la rencontre, l’Etat américain de l’Alaska, ne semble pas avoir été choisi au hasard. Cet ancien territoire russe, vendu aux Etats-Unis il y a plus de 150 ans, incarne à la fois l’histoire commune entre les deux puissances, mais aussi leur proximité géographique. C’est également la porte d’entrée vers l’une des zones les plus contestées de la planète actuellement – l’Arctique – source à la fois de tensions, mais aussi de potentielles collaborations entre Washington et Moscou.

Métaux rares et ressources énergétiques

La région qui entoure le pôle Nord, jouxtée par les Etats-Unis, le Canada, le Groenland, les pays nordiques et la Russie, est au carrefour de plusieurs enjeux. En effet, avec la fonte des glaces provoquées par le réchauffement climatique, des voies maritimes jusqu’ici impraticables pourraient s’ouvrir, offrant un accès privilégié et bien plus rapide entre l’Asie et l’Amérique du Nord. Pékin nourrit ainsi l’ambition d’investir dans des infrastructures pour y asseoir sa présence commerciale et militaire, une perspective qui inquiète Washington.

La région regorge aussi de ressources en métaux rares et énergétiques : or, nickel, cuivre, diamant, platine, pétrole, gaz… Là encore, la fonte des glaces pourrait faciliter l’accès à des réserves non-accessibles à l’heure actuelle. Certains gisements sont situés dans les eaux internationales. Or, l’autorité multilatérale qui régissait la zone, le Conseil de l’Arctique, réunissant les huit pays du cercle polaire, dont la Russie, ne se réunit plus depuis le début de la guerre en Ukraine. Mais il se pourrait que les Etats-Unis cherchent à renouer le dialogue avec Moscou à ce sujet. Le gouverneur républicain de l’Alaska, Mike Dunleavy, espère ainsi voir ces réunions reprendre : « Nous pouvons renouer avec la coopération sur l’Arctique […], chaque fois qu’on peut entretenir de bonnes relations avec un voisin aussi proche, c’est de bon augure pour tout le monde », a-t-il déclaré au magazine américain Newsweek, en amont du sommet.

Enjeux militaires

Héritière de la guerre froide, la région abrite aussi plusieurs bases militaires stratégiques. Moscou, qui détient la moitié de la façade arctique, a récemment modernisé d’anciennes infrastructures soviétiques, notamment à Mourmansk, port d’attache de sa flotte nucléaire. En parallèle, l’OTAN a aussi renforcé sa présence grâce à l’intégration récente de la Suède et de la Finlande. Pour la Russie, freinée en mer Baltique par l’élargissement de l’Alliance, l’Arctique offre un espace de nouvelles potentielles avancées.

Les Européens, eux aussi, aimeraient affirmer plus efficacement leur présence dans l’Arctique. La Norvège, « yeux et oreilles » de l’OTAN dans le Grand Nord, pour reprendre les mots de son chef du renseignement, Nils Andreas Stensones, a récemment affiché dans The Economist sa volonté de renforcer son contrôle sur l’archipel de Svalbard. L’Union européenne entend également peser davantage dans la région, d’autant plus depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine.

Vers une coopération entre les Etats-Unis et la Russie ?

« L’Arctique est une région particulière en raison de la complémentarité et de la proximité géographique des Etats-Unis et de la Russie », assure Pavel Devyatkin, de l’Institut de l’Arctique, cité par Newsweek. Malgré les tensions, les observateurs soulignent en effet de possibles complémentarités entre Washington et Moscou : les brise-glaces russes, en coopération avec les technologies satellitaires américaines, pourraient faciliter l’accès à de nouvelles ressources.

Pour Mike Sfraga, ancien ambassadeur américain dans l’Arctique, la question ukrainienne et celle de l’Arctique sont finalement intimement liées : « Si une paix juste et durable peut être obtenue en Ukraine […], de meilleures relations entre les États-Unis et la Russie pourraient permettre une coopération entre toutes les nations de l’Arctique afin qu’elles puissent ensemble saisir les opportunités urgentes présentes dans toute la région », a-t-il assuré au quotidien américain.



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Publish date : 2025-08-16 16:22:00

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