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Entre la Russie et l’Ukraine, la guerre énergétique fait rage

Entre la Russie et l’Ukraine, la guerre énergétique fait rage

Un incendie qui ravage un terminal gazier près de Saint-Pétersbourg. Des attaques sur l’un des plus longs oléoducs du monde, utilisé par Moscou pour approvisionner l’Europe centrale. Ou encore ces frappes de drones dans la nuit du 26 août contre des infrastructures énergétiques de six régions ukrainiennes, laissant plus de 100 000 personnes sans électricité. Depuis le début du conflit en Ukraine, Kiev et Moscou se sont lancés dans une véritable « guerre énergétique », multipliant les opérations sur des sites stratégiques.

Au cours du seul mois d’août, l’armée ukrainienne a revendiqué au moins dix attaques contre des installations pétrolières russes, paralysant temporairement une partie importante de la capacité de raffinage du pays, selon des analystes interrogés par le New York Times. A l’inverse, les troupes de Vladimir Poutine, elles, ont intensifié leurs attaques contre des raffineries de pétrole, des centrales thermiques ou encore des sous-stations électriques, faisant craindre des pénuries d’énergie cet hiver.

« La guerre ne se déroule pas seulement sur la ligne de front. […] Ces frappes n’ont pas d’impact direct sur l’activité militaire, mais elles impactent l’économie russe. Or, celle-ci est déjà en difficulté, et même une petite poussée peut créer des goulots d’étranglement et multiplier les problèmes », a alors déclaré Pavlo Klimkin, l’ancien ministre ukrainien des Affaires étrangères, comme le rapporte le Wall Street Journal.

Des répercussions sur le terrain

Sur le terrain, les conséquences pour les populations civiles sont en effet nombreuses. L’intensification de la campagne d’attaques par des drones ukrainiens, de plus en plus sophistiqués, a entraîné la panne d’environ 13 % de la production russe de carburant, d’après plusieurs experts. Une situation difficile, d’autant que les sanctions imposées par l’Occident après l’invasion de 2022 ont limité la capacité de Moscou à réparer les infrastructures et à entretenir les installations restantes.

Parallèlement, les perturbations désormais fréquentes des réseaux ferroviaires et aéroportuaires russes par les drones ukrainiens ont contraint davantage de Russes à se déplacer par la route pendant leurs vacances d’été, au moment même où la demande de carburant a explosé en raison de la saison des récoltes. En conséquence, plusieurs régions, dont la Crimée occupée par la Russie et certaines parties de la Sibérie, ont mis en place le rationnement des stations-service. L’essence, lorsqu’elle est disponible, voit ses prix exploser : plus de 45 % de hausse cette année, alors même que les prix mondiaux du pétrole brut ont fortement baissé.

Du côté de l’Ukraine, qui a subi de nombreuses attaques au cours des trois premières années du conflit visant notamment à couper son électricité et à plonger les habitants dans le noir, environ 1 milliard de mètres cubes de gaz naturel, soit environ 5 % de ses besoins annuels, aurait été perdu, selon Andrii Zhupanyn, président de la sous-commission du Parlement ukrainien chargée de la politique du gaz naturel, cité par le New York Times. Le pays, mené par Volodymyr Zelensky, aurait alors recherché d’urgence des financements auprès de partenaires européens, pour acheter et importer du gaz avant la saison de chauffage hivernal.

Faire pression sur l’adversaire

A travers cette guerre de l’énergie, les deux pays ne chercheraient pas seulement à miner le moral des populations. Alors que les Etats-Unis mènent une campagne intensive pour aboutir à un accord de paix, Moscou et Kiev souhaiteraient convaincre l’autre camp qu’il ne peut se permettre de poursuivre le conflit, et signaler à la Maison-Blanche qu’il dispose d’un avantage. « Pour l’Ukraine, il est important de faire pression sur la Russie pendant ces pourparlers de paix. Ces frappes [sur les sites énergétiques] en sont un levier important », analyse auprès du New York Times Andrian Prokip, expert en énergie à l’Institut Kennan de Washington.

Si un premier moratoire sur les frappes énergétiques avait été signé en mars dernier, sous la pression de l’administration Trump, la trêve a pris fin mi-juin, lorsque la Russie a commencé à frapper une raffinerie de pétrole clé à Krementchouk, causant « de graves dommages », selon Andrii Zhupanyn. Moscou a également visé des installations gazières ukrainiennes, cibles qu’elle avait évitées pendant les trois premières années de la guerre, lorsque les gazoducs traversant l’Ukraine étaient encore utilisés pour acheminer le gaz russe vers l’Europe.

En retour, des drones ukrainiens à longue portée ont attaqué des raffineries de pétrole dans le sud-ouest et le centre de la Russie, déclenchant de vastes incendies et paralysant plusieurs installations. Parmi les cibles figurait la raffinerie géante Lukoil de Volgograd, la plus grande du sud de la Russie et l’une des dix premières productrices du pays, selon les autorités officielles.

« L’Ukraine est désormais en mesure de mener des attaques soutenues. L’année dernière, elle avait déjà tenté la même chose, mais les ogives étaient plus légères et le taux de réussite plus faible. Or, une fois les conséquences d’une frappe réparées, une nouvelle frappe suit. Et si l’Ukraine parvient à maintenir cette pression et à endommager les raffineries plus fréquemment que la Russie ne parvient à les réparer, la situation sera complètement différente », a commenté Sergey Vakulenko, l’ancien directeur de la stratégie et de l’innovation chez Gazprom Neft, l’une des principales compagnies pétrolières publiques russes, cité par le Wall Street Journal.

De son côté, Donald Trump a affirmé être prêt à imposer des sanctions économiques à la Russie si Vladimir Poutine ne donnait pas son accord à un cessez-le-feu. Car la rencontre prochaine entre les deux présidents, annoncée avec enthousiasme par Trump, piétine.



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Publish date : 2025-08-27 15:58:00

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