Après tout, ce Boualem Sansal n’exagère-t-il pas ? C’est vrai : le voilà qui « se rend en Israël et dit du bien de la société israélienne, alors qu’un bon Algérien, en France, est antisémite ! » Pis, « il prend François Zimeray, qui est juif, comme avocat. Or Boualem sait très bien que le gouvernement algérien n’est pas antisémite du moment qu’il n’y a pas de juif » ! Et puis « il déteste les intégristes ». Non vraiment, là aussi, Boualem Sansal exagère. Et si vous n’êtes toujours pas convaincu que Boualem Sansal exagère, n’oubliez jamais qu’il est l’auteur « d’un livre qui évoque la complicité entre nationalistes musulmans et nazis, alors que nos intellectuels les plus prestigieux – de Jean-Paul Sartre à Jean Genet – n’avaient pas remarqué qu’ils soutenaient des factions arabes financées par de l’argent nazi ». Mais là où Boualem Sansal exagère bien au-delà de l’acceptable, « c’est de ne pas avoir applaudi aux attentats du 11 Septembre, contrairement à notre écrivaine nationale, Annie Ernaux, Prix Nobel de littérature » !
Ce jeudi soir, à Autun, petite ville de 15 000 âmes en Saône-et-Loire où Napoléon Bonaparte a appris le français et où Jean-Michel Blanquer organise les universités d’été de son think tank, le Laboratoire de la République, le journaliste Philippe Val égrène, avec le mordant qu’on lui connaît, et sous les rires et les applaudissements à tout rompre de l’audience, les péchés qui valent à son ami d’être emprisonné depuis neuf mois dans les geôles algériennes. Ou plutôt, « qui valent à Boualem Sansal le silence d’une grande partie des intellectuels français », corrige Philippe Val, journaliste et auteur de La Gauche et l’antisémitisme (éd. de l’Observatoire, 2025). Car, « pour beaucoup trop d’écrivains », s’agace l’ancien directeur de France Inter et de Charlie Hebdo, « Boualem l’a bien cherché ». Comme Charb à son époque ? Entretien.
L’Express : Vous étiez la semaine dernière à la soirée organisée par le Laboratoire de la République consacrée à Boualem Sansal, dont la persécution a été comparée par la présidente du Printemps républicain à celle que Charb a vécu avant son assassinat par deux terroristes. Celui qui raconte par des écrits ou par le dessin est-il condamné à être persécuté ? Est-ce inévitable ?
Philippe Val : Comme je connaissais bien les deux, Charb et Boualem Sansal, je peux dire qu’ils n’étaient pas toujours sur les mêmes positions. Mais il y a malgré tout quelque chose de commun entre eux : la liberté d’expression et la liberté de conscience, qui sont vraiment au fondement de nos sociétés – je pense ici aux sociétés d’Europe de l’Ouest. C’est là que les Constitutions sont les plus solides, les plus efficaces.
Dans nos sociétés, la menace qui pèse sur la liberté d’expression et de conscience ne vient plus du pouvoir politique. Autrefois, dans les régimes autoritaires, religieux ou sous la royauté absolue, la répression descendait du haut vers le bas. Aujourd’hui, c’est l’inverse : le danger vient d’en bas, de la société elle-même, et il remonte vers le haut. Cela change beaucoup de choses. Certains d’entre nous peuvent encore s’exprimer librement, mais à une condition : être protégés. Moi, je peux parler, donner des conférences, écrire, exercer ma vie de journaliste et d’écrivain, parce que je vis sous protection policière. Sans cela, je ne pourrais pas le faire, je serais empêché dans ma vie publique, et même dans ma vie privée. Nous sommes quelques-uns, aujourd’hui, à être menacés directement par ce qu’il se passe dans la société. Boualem Sansal était dans cette situation en France, en République tchèque, en Allemagne et, a fortiori, en Algérie.
Or, en Algérie, malgré la signature de conventions internationales sur la liberté d’expression, le pouvoir ne respecte absolument rien. C’est un régime de gangsters qui ont pillé toutes les richesses du pays, spolié le peuple et qui l’oppriment encore, au nom d’une idéologie mêlant anticolonialisme et communisme. Boualem Sansal est une victime de cela. Comme d’autres, qui parfois pour des raisons touristiques, familiales ou journalistiques, se retrouvent arrêtés du jour au lendemain et accusés d’espionnage. Dans cette affaire, l’Algérie s’est placée au même niveau que l’Iran, celui des Etats-voyous, qui utilisent les êtres humains comme monnaie d’échange, comme instruments de pression sur les démocraties et les pays libres.
Voilà neuf mois que Boualem Sansal est emprisonné, considérez-vous que l’action de la France pour sa libération a été insuffisante ou était-ce perdu d’avance avec un régime comme celui qu’est devenu l’Algérie ?
Depuis son premier mandat, Emmanuel Macron semble hanté par le risque d’une révolte, en France, des jeunes issus de l’immigration et la crainte d’un ferment de guerre civile prêt à éclater dans plusieurs villes. C’est pour cela qu’avant même d’être élu, il est allé flatter le régime algérien, en parlant de « crimes contre l’humanité » commis par la France. Il a commis là une faute politique majeure, et il s’y est enfermé. Il a cru – et continue de croire – que, en cédant toujours davantage, le régime algérien finirait par se montrer conciliant, voire amical. Mais non ! Un crocodile ne s’apprivoise pas. Quand on lui tend le bras, il dévore le torse ; et quand il a le torse, il finit par engloutir le corps entier.
Ces dirigeants ne comprennent qu’un seul langage, qui n’est pas le nôtre. Depuis la Seconde Guerre mondiale, nous nous sommes construits sur le droit, par opposition au rapport de force violent. Mais, face à eux, il aurait fallu parler leur langage. Nous aurions dû fermer tous les robinets : remettre en question les accords de 1968, la clause de l’immigration la plus favorisée accordée à l’Algérie, couper leurs privilèges. Car ces dirigeants algériens se présentent comme des héros anticoloniaux, mais, en réalité, ils profitent de l’Europe. Ils ont fait leurs études ici, possèdent des propriétés, se soignent dans nos hôpitaux avec des traitements extrêmement coûteux qu’ils ne paient pas, alors même qu’ils sont immensément riches.
Si la France avait agi ainsi, le président Tebboune aurait compris qu’il y avait un problème. Et surtout, nous aurions dû rallier nos partenaires européens. Car l’attitude de l’Algérie ne concerne pas que la France, elle finit aussi par peser lourd pour le reste de l’Europe. Nous avons manqué de détermination européenne et de fermeté. Enfin, ce que nous n’avons pas su rappeler, c’est qu’il s’agit de quelque chose de sacré pour notre histoire : la protection des intellectuels. Depuis l’Ancien Régime, déjà, et plus encore au XVIᵉ siècle, c’est une constante de notre tradition. Sans cette protection, nous ne connaîtrions sans doute pas Montaigne, par exemple. Défendre un écrivain, un intellectuel, c’est défendre une part essentielle de notre civilisation.
Faudrait-il renforcer la protection des intellectuels, leur accorder davantage de garanties ?
Je pense surtout que les intellectuels eux-mêmes ne font pas leur part du travail. Aujourd’hui, c’est la rentrée littéraire : combien de romans paraissent ? 400, peut-être ? Dans un pays véritablement cultivé – et je ne parle pas seulement de culture littéraire, mais d’une culture héritière de l’esprit européen –, ces 400 écrivains devraient être les premiers à dire : « Nous voulons que Boualem Sansal soit libre. » Mais je ne les entends pas. Or c’est insupportable.
Evidemment, pour moi, c’est un chagrin particulier, parce que je connais Boualem depuis longtemps et que je l’aime beaucoup. Mais, même sans ce lien personnel, ce serait intolérable. Comme cela l’était pour Salman Rushdie quand il vivait sous la menace permanente d’une fatwa. On ne peut pas s’en prendre ainsi à la création, à la pensée européenne.
Pensez-vous que, parmi ces écrivains, certains se disent, comme avec Charb, qu’après tout, peut-être, « il l’a bien cherché » ?
Bien sûr. C’est même ce qui explique en grande partie leur silence. Ils pensent qu’il exagère, que le problème, c’est lui. Il y a quelques années, Boualem Sansal a reçu le prix des écrivains francophones. La cérémonie devait avoir lieu à l’Institut du monde arabe. Mais, entre le moment où le prix lui a été attribué et celui où il devait lui être remis, Boualem a effectué son fameux voyage en Israël. Résultat, l’Institut du monde arabe, à Paris, a décidé qu’il ne recevrait pas son prix dans ses murs. Finalement, la remise a eu lieu discrètement, dans une petite salle des éditions Gallimard. A l’époque, j’étais directeur de France Inter, j’avais alors immédiatement suspendu tous les partenariats avec l’Institut du monde arabe. J’avais prévenu que tant que Boualem n’aurait pas reçu son prix dans leurs locaux, il n’y aurait plus de partenariat avec France Inter.
Mais, dans son ensemble, le monde universitaire n’aime pas Boualem Sansal, parce qu’il ne correspond pas à l’image qu’ils veulent avoir des Arabes, ni à la manière dont ils aiment que les Arabes soient représentés. Ils préfèrent, au fond, le Hamas à un Arabe laïque, républicain. Pour eux, un Arabe républicain, c’est un « harki ». Et leur histoire a été construite contre les harkis. Il y a donc là quelque chose de très profond, d’historiquement ancré – et de franchement dégueulasse. C’est aussi pour cette raison que la France n’a pas été ferme dans l’affaire Sansal. Cela ne correspond pas à la culture dominante de ces milieux – une culture Télérama, Le Monde, France Inter. Dans ces cercles-là, Boualem Sansal dérange. Il « sent mauvais », comme on dit. Quand il dit que prier sans cesse à la mosquée, voiler les femmes, maintenir des pratiques rétrogrades, ce sont des problèmes réels, il brise le confort idéologique. C’est pour cela qu’on le traite de « mauvais Arabe ». Pourtant, il n’est pas du tout d’extrême droite, je le connais très bien, il est simplement radicalement laïque.
Vous accusez le régime algérien d’antisémitisme, notamment pour avoir refusé l’entrée sur son territoire à l’avocat de Boualem Sansal, François Zimeray, au motif qu’il était juif. Là où la France et d’autres nations ont consenti d’importants efforts pour rompre avec ce poison, l’Algérie a-t-elle, elle, un jour véritablement cherché à s’affranchir de ses penchants antisémites ?
Jamais ! Il y a eu une campagne antisémite hallucinante contre François Zimeray, qui a duré deux mois dans la presse algérienne. Je vais vous raconter une anecdote. J’étais très ami avec Claude Lanzmann, qui était lui-même proche de Sartre. Pendant la guerre d’Algérie, Sartre l’a envoyé sur le terrain comme correspondant. Lanzmann connaissait donc très bien les chefs du FLN.
Quelques jours avant les accords d’Evian, il passe une soirée avec Ben Bella. Et Ben Bella lui dit : « C’est formidable, on va signer les accords d’Evian, ça va être génial. On va prendre modèle sur Israël : c’est extraordinaire ce qu’Israël a fait au Moyen-Orient ! Nous allons établir des traités avec eux, développer des échanges commerciaux, culturels, etc. » Quinze jours plus tard, après la signature des accords, revirement total. Israël est proclamé ennemi n° 1, l’anti-sionisme devient la ligne officielle, dans une euphorie générale. En quelques jours à peine, tout avait basculé. Et les juifs d’Algérie ont été chassés.
Cet antisémitisme auquel s’ajoute aujourd’hui un anti-sionisme assumé doit-il inquiéter nos pouvoirs publics en ce qu’il pourrait alimenter l’antisémitisme sur notre sol ?
Evidemment, et c’est bien là le problème. En France, l’antisémitisme musulman a trouvé un écrin politique français : La France insoumise, qui est aujourd’hui un grand parti. Quand je dis grand, ce n’est pas par ses qualités, mais parce qu’il a une audience nationale, des figures connues qui passent à la télévision, une influence dans l’opinion. Sans cet écrin politique, cet antisémitisme-là n’aurait jamais eu l’écho qu’il a aujourd’hui.
C’est donc la conjonction entre, d’un côté, un parti politique radical composé de bobos, de trotskistes et autres courants d’extrême gauche et, de l’autre, une partie de l’immigration musulmane violemment antisémite. Une partie qui est tellement endoctrinée qu’elle pense que son honneur ne sera rétabli que « le jour où la Palestine sera libérée de la rivière à la mer ». Alors même que, bien souvent, ces gens sont incapables de situer la Palestine sur une carte, et n’ont aucune connaissance de l’Histoire – ni de la déclaration Balfour, en 1917, ni de la création de l’Etat d’Israël, en 1948, ni même de l’échec des accords de Camp David. Ils ne savent rien, et d’ailleurs ils s’en fichent.
Vous avez justement étudié les accointances de la gauche avec l’antisémitisme dans un livre, La Gauche et l’antisémitisme, paru au printemps dernier. A quand ces liaisons dangereuses remontent-elles ?
Manuel Valls, également présent aux universités d’été du Laboratoire de la République, parlait des « deux gauches irréconciliables » ; en réalité, elles l’ont toujours été. Depuis le XIXᵉ siècle, et même depuis la Révolution française. Il y a une gauche qui se réclame de septembre 1792 – les massacres, la prise de pouvoir par Robespierre, la Terreur, jusqu’à sa chute. Et puis il y a une autre gauche, celle de Condorcet, dernier représentant des Lumières, condamné à mort par les robespierristes. Les acteurs de la Terreur n’étaient pas des voltairiens ni des encyclopédistes : c’étaient des rousseauistes. Rousseau est, selon moi, le plus « anti-Lumières » des philosophes des Lumières. Marat, Robespierre, et toute cette bande étaient rousseauistes. Leurs héritiers intellectuels au XIXᵉ siècle – et notamment Marx – s’en sont réclamés. C’est cette gauche-là que je qualifie d’antisémite.
Il suffit de relire l’article de Marx « Sur la question juive », un texte d’un antisémitisme déchaîné, sans limite. Toute une partie de la gauche y a puisé, et y puise encore aujourd’hui, discrètement. Lors de l’affaire Dreyfus, Jules Guesde et son courant étaient antidreyfusards, pour les mêmes raisons que Marx était antisémite – bien qu’il fût lui-même issu d’une famille juive convertie au protestantisme. Luther, rappelons-le, était un antisémite virulent. Il y a donc un « péché originel » d’une partie de la gauche : la Terreur, le mépris de l’esprit européen, la détestation de ce qu’il représente. Ce sont non pas des patriotes, mais des nationalistes. Et leur communisme, au fond, a toujours fini par se transformer en nationalisme – en Russie, en Chine, en Corée du Nord. Toujours. Et toujours avec une dimension antisémite.
Alors, quand ces militants de gauche ont vu les Arabes se battre contre l’Europe qu’ils détestent, ils y ont trouvé une cause qui les enchantait. La décolonisation, parfois, était une bonne cause, nous en conviendrons. Mais ils y voyaient aussi un antisémitisme qui leur convenait parfaitement, enraciné dans leur tradition. Moi, j’ai connu ça de près. Dans les années 1970, les gauchistes radicaux faisaient partie de mon public. Ils me trouvaient étrange, mais je les trouvais encore plus étranges qu’eux ne me trouvaient étrange ! [Rires.]
Etaient-ils, selon vous, déjà anti-sionistes à cette époque ?
Au début, non. Dans les années 1970, Israël était très populaire, tout comme l’Europe. La construction européenne et l’Etat d’Israël suscitaient le même enthousiasme. Mais cela a vite changé. L’antisémitisme a explosé à la deuxième Intifada. Mais on en trouvait déjà les germes dans les années 1970. Regardez les déclarations de Sartre à l’époque des attentats de Munich. Il avait applaudi l’assassinat des athlètes israéliens. Plenel aussi, mais c’était moins surprenant venant de lui. Claude Lanzmann, lui, avait été bouleversé et furieux. Mais il avait fini par pardonner à Sartre, ce qui avait été un sujet de dispute entre Claude et moi. Je lui disais « comment as-tu pu te rabibocher avec Sartre après ça ? » Je l’ai emmené en Israël, et au retour il avait dit du bien de ce pays. Mais je n’ai jamais vraiment compris sa réconciliation avec Sartre.
Quelles sont, selon vous, les différences entre l’antisémitisme qui a macéré pendant des décennies dans les milieux d’extrême droite, et celui qui existe à gauche ?
Il y a plusieurs formes d’antisémitisme. Historiquement, on retrouve un antisémitisme chrétien, qui a ensuite nourri un antisémitisme de gauche aux XIXᵉ et XXᵉ siècles. Si l’on remonte à l’origine, le christianisme s’est imposé dans l’Empire romain au prix d’un tour de passe-passe théologique. Pour conquérir l’Empire, il fallait éviter de dire que les Romains étaient responsables de la mort du Christ. On a donc accusé les juifs. C’est saint Paul, puis les évangélistes qui ont imposé ce récit. Cet antisémitisme s’est institutionnalisé dans ce qu’on appelle aujourd’hui « la droite », et a nourri ensuite les nationalismes de la fin du XIXᵉ siècle. Dès lors qu’on rêve d’une race pure, les juifs n’y ont pas leur place. C’est un antisémitisme anti-européen par excellence. Hitler et Staline avaient cela en commun : être des anti-européens forcenés, et donc antisémites.
On entend de plus en plus de personnalités évoquer la résurgence d’un antisémitisme de gauche. En revanche, rares sont celles qui osent dire, comme vous, que le principal moteur de l’antisémitisme aujourd’hui serait l’islamisme. Pourtant, Günther Jikeli, montrait déjà en 2015, dans son livre – European Muslim Antisemitism : Why Young Urban Males Say They Don’t Like Jews – que les « attitudes » et les opinions antisémites étaient beaucoup plus répandues parmi les musulmans que dans d’autres segments de la société européenne.
Il y a huit ou dix ans, j’ai rédigé un manifeste publié dans Le Parisien et Le Parisien Dimanche qui dénonçait l’antisémitisme de gauche devenu le carburant de l’islamisme en France. J’avais sollicité des personnalités très diverses : des patrons comme François Pinault, des anciens présidents de la République, des Premiers ministres, des intellectuels… Il y a eu des signatures de poids comme Charles Aznavour, Bertrand Delanoë, et d’autres fidèles. Pas Hidalgo, par contre, et malheureusement pour moi, Richard Ferrand avait interdit aux macronistes de le signer ! [Rires.] Ce manifeste a fait beaucoup de bruit alors que je ne faisais que décrire une réalité. Le fait qu’il y ait des endroits en France où des juifs ne peuvent plus vivre ni même inscrire leurs enfants à l’école.
J’ai parlé d’ »épuration ethnique à bas bruit », et cette expression a beaucoup choqué en France mais aussi à l’étranger. J’avais aussi sollicité des responsables catholiques, protestants, juifs, et même des musulmans. Quelques imams ont signé. Cela a déclenché des réactions violentes au Moyen-Orient, au Maghreb et surtout en Turquie, où le ministre des Affaires étrangères m’a publiquement attaqué. Je pense que ce sont les Turcs qui ont réveillé Al-Qaeda contre moi. Je me suis retrouvé menacé, avec une protection policière lourde. Edouard Philippe, alors Premier ministre, a même reçu lui-même une menace visant ma personne. Mais, ce que je regrette, c’est l’absence totale de soutien du monde intellectuel français – pas un mot du Collège de France, par exemple.
Et, du côté des responsables politiques avec lesquels vous en avez discuté, partageaient-ils votre constat ?
Oui. A l’époque, tous les ministres de l’Intérieur, de droite comme de gauche, ont signé le manifeste. Les gardes des Sceaux aussi. Eux savaient. Mais, aujourd’hui, l’essentiel de la classe politique a peur d’une partie de la population. Ils ne veulent pas faire de vagues ni dire les choses clairement. Ils craignent une situation factieuse. Jean-Luc Mélenchon n’accédera jamais au pouvoir par une victoire majoritaire au suffrage universel, et il le sait. Alors, en bon trotskiste, il se munit d’une arme : la menace d’un soulèvement des banlieues. Comme un Américain avec son flingue chargé. Il croit pouvoir mettre le pays à feu en déclenchant des émeutes incontrôlables. C’est son fantasme, comme celui de tous les trotskistes. Je le connais personnellement, il n’est pas idiot, mais il fonctionne ainsi ; une minorité qui terrorise un pays amorphe, comme à Petrograd en 1917.
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Author : Ambre Xerri
Publish date : 2025-09-02 18:00:00
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