Le phénomène a commencé avec Lilia Hassaine. En 2019, la chroniqueuse de Quotidien publie chez Gallimard un premier roman, L’Œil du paon, suivi en 2021 de Soleil amer. Elle quitte alors l’émission de Yann Barthès. Choix suicidaire, pense-t-on. Va-t-elle disparaître des radars ? C’est au contraire à ce moment-là qu’elle prend pour de bon son envol : Panorama est l’un des gros succès de la rentrée littéraire 2023 – lauréat du prix Renaudot des lycéens, il atteint les 100 000 exemplaires en grand format.
Cette même rentrée 2023 est marquée par un autre aspirant auteur vu à la télé chez Barthès : Panayotis Pascot. Dès l’été, son éditeur, Stock, avait été obligé de réimprimer au vu de l’emballement des précommandes. En septembre, c’est l’explosion : il s’arrachera plus de 200 000 exemplaires de La Prochaine fois que tu mordras la poussière, longue plainte ressemblant à du Annie Ernaux 2.0. On pensait le filon épuisé ? C’était sans compter sur Ambre Chalumeau. En début d’année, la critique littéraire de Quotidien sort Les Vivants. Malgré un style de collégienne potache (ou peut-être plutôt grâce à cela ?), elle parvient à écouler plus de 50 000 exemplaires de sa confession d’une bobo du siècle. Dans le même temps, sa collègue Mahaut Drama s’invite, elle aussi, dans les librairies avec Que jeunesse se passe (Robert Laffont). Bien que plus talentueuse qu’Ambre Chalumeau, elle trouve dix fois moins de lecteurs. Cette fois, se dit-on, on a fait le tour de la question.
Paul Gasnier est l’une des révélations de la rentrée
Eh bien non ! Dans notre classement des romans, un intrus se retrouve cette semaine en 4e position derrière les poids lourds Carrère, Nothomb et Mauvignier. Publié chez Gallimard comme Lilia Hassaine avant lui, Paul Gasnier est l’une des révélations de la rentrée, moins par ses qualités stylistiques que par la surface qu’il occupe. Parmi les débutants de cet automne, notre goût nous fait de beaucoup préférer la gouaille de Mathilda di Matteo (La Bonne Mère, L’Iconoclaste) ou la poésie de Rebeka Warrior (Toutes les vies, Stock). En racontant dans La Collision la mort de sa mère, tuée accidentellement par un délinquant à Lyon, Gasnier écrit lui aussi à l’ombre d’Ernaux, dans une langue pauvre qui tient plus de la sociologie que de la littérature.
Si les médias de « droite » snobent ce récit angélique, l’auteur a eu droit à la matinale de France Inter dès le 1er septembre. Puis Ambre Chalumeau a fait son éloge confraternel sur le plateau de Quotidien. Il faut croire qu’être adoubé par Barthès est un booster de ventes peu commun : Gasnier est déjà au-dessus des 10 000 exemplaires ! Et ce n’est sans doute que le début. La Collision étant en lice pour le Goncourt, le livre concourt aussi pour le Goncourt des lycéens. Un texte simple et volontiers démagogique, qui dépasse à peine les 150 pages, avec un jeune auteur télégénique… Quelque chose nous dit qu’il va faire un carton lors des rencontres avec lesdits lycéens, et qu’ils pourraient le choisir comme lauréat, comme ils avaient plébiscité Lilia Hassaine pour le Renaudot de leur catégorie il y a deux ans. Conseil aux éditeurs intéressés : repérez qui chez Barthès n’a encore rien écrit, signez-lui un contrat et misez sur lui pour la rentrée littéraire 2026.
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Author : Louis-Henri de La Rochefoucauld
Publish date : 2025-09-12 15:12:00
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