Volodymyr Zelensky n’a pas caché sa déception à l’issue de sa visite à la Maison-Blanche, vendredi soir. Venu rencontrer son homologue américain Donald Trump afin de le convaincre de livrer à l’Ukraine des missiles Tomahawk, capables de frapper profondément en territoire russe, il a vite déchanté. Après une longue conversation téléphonique jeudi 16 octobre avec Vladimir Poutine, le président américain a réorienté sa priorité : négocier un cessez-le-feu plutôt que muscler l’arsenal de Kiev.
« J’espère que nous pourrons mettre fin à la guerre sans avoir à penser aux Tomahawk », a lancé Trump face à son homologue ukrainien, évoquant un président russe désormais « prêt à un accord ». Le message est clair : l’heure n’est pas à l’escalade. Et ce, malgré les efforts répétés de Kiev pour convaincre Washington que seule la pression militaire pouvait faire plier Moscou. « La rencontre avec le président ukrainien Volodymyr Zelensky a été très intéressante et cordiale, mais je lui ai dit, comme je l’ai par ailleurs fortement suggéré au président Poutine, qu’il était temps d’arrêter la tuerie et de trouver un ACCORD », a-t-il écrit sur son réseau Truth Social. Donald Trump a même suggéré que les deux parties « s’arrêtent où elles sont », laissant à l’histoire le soin de trancher sur la victoire ou la défaite. « Respectez la ligne de front, où qu’elle se trouve, sinon cela deviendra trop compliqué », a-t-il jugé, face à des journalistes en Floride.
Donald Trump avait déjà exposé plus tôt sa réserve face à une potentielle livraison à l’Ukraine de ces missiles d’une portée allant jusqu’à 2 500 kilomètres, à laquelle Moscou est totalement opposé. Mais pour Kiev, la volte-face américaine est un coup dur. Les Tomahawk étaient au cœur de la stratégie ukrainienne : frapper les installations pétrolières russes, peser sur l’économie de guerre du Kremlin et forcer Moscou à revenir à la table des négociations. Cette pression militaire, déjà partiellement efficace selon plusieurs analystes, devait consolider la position ukrainienne avant l’hiver. Mais en reculant, Donald Trump laisse son partenaire se débrouiller seul. Volodymyr Zelensky, lucide, a pris acte de ce revers.
Une répétition dangereuse ?
Derrière cette décision, c’est la relation entre Donald Trump et Vladimir Poutine qui intrigue à Kiev. Après leur entretien téléphonique de jeudi, décrit comme « très productif » par l’Américain et « empreint de confiance » par le Russe, les deux hommes ont annoncé une rencontre prochaine à Budapest. De quoi raviver les craintes d’un tête-à-tête déséquilibré, à l’image de celui d’Alaska en août, resté sans suite concrète.
Mais comme le rappelle à juste titre Volodymyr Zelensky, Donald Trump n’a pas dit « oui » aux livraisons de Tomahawk, mais il n’a pas dit « non » non plus. La menace, qui avait déjà fait réagir le président russe, reste donc en suspens. En renvoyant les deux belligérants dos-à-dos, Trump ménage délibérément Poutine tout en renforçant progressivement la pression sur la Russie : d’abord économiquement en empêchant l’Inde d’acheter du pétrole russe, et militairement via le renforcement de l’Otan.
Les Ukrainiens, eux, voient dans cette dynamique une répétition dangereuse : « Trump est retombé dans le piège de Poutine », accuse Oleksandr Merezhko, président de la commission des affaires étrangères du Parlement ukrainien, lors d’une interview après la réunion de vendredi pour le New York Times. Contrairement à ce qu’affirme Donald Trump, Volodymyr Zelensky répète que le président russe n’est « pas prêt » à la paix. Donald Trump a certes jugé « possible » que Vladimir Poutine essaie de jouer la montre, en réponse à la question d’une journaliste de l’AFP, mais il a ajouté : « Pendant toute ma vie, les meilleurs ont essayé de se jouer de moi. Et je m’en suis vraiment bien sorti. »
Sur le terrain, la Russie intensifie ses frappes contre les infrastructures énergétiques ukrainiennes, accentuant la pression à l’approche de l’hiver. Vendredi, elle a aussi revendiqué la prise de trois villages ukrainiens. Les experts espèrent que l’annonce d’un sommet russo-américain permettra au moins une accalmie temporaire, le Kremlin cherchant à se présenter sous un jour favorable avant les discussions. Un cessez-le-feu local a d’ailleurs été accepté près de la centrale de Zaporijia, pour permettre des réparations d’urgence.
En l’absence de soutien militaire américain accru, Kiev doit maintenant miser sur ses récentes avancées tactiques, la résilience de ses troupes sur le front, et les financements européens en cours de discussion.
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Publish date : 2025-10-18 13:39:00
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