L’Express

Guerre commerciale : le soja, trophée diplomatique de Donald Trump face à la Chine

Guerre commerciale : le soja, trophée diplomatique de Donald Trump face à la Chine

« Nos agriculteurs seront très contents ! » A peine sorti du tête-à-tête avec son homologue Xi Jinping, Donald Trump exultait déjà de sa victoire sur son réseau social favori. Avec son emphase habituelle, il s’est félicité des prochains achats « d’énormes » volumes de soja et d’autres céréales par Pékin. Preuve de l’importance du sujet : il l’a mentionné avant même de parler des terres rares, dont les contrôles à l’exportation ont été repoussés d’un an. Si les contours de ce compromis étaient encore flous jeudi 30 octobre, le secrétaire au Trésor Scott Bessent a précisé que les Etats-Unis allaient livrer 25 millions de tonnes par an de cette légumineuse à la Chine au cours des trois prochaines années.

Pour les agriculteurs américains, qui commencent la saison des récoltes, la nouvelle tombe à pic. Car les derniers mois ont été rudes : en mai, Pékin – historiquement premier acheteur de soja américain – a interrompu ses commandes en réponse à l’offensive douanière lancée par Washington. Durant l’été, les volumes exportés en Chine ont été réduits à néant, une partie de l’approvisionnement pivotant vers l’Amérique latine. Résultat : les producteurs du Midwest ont dû remplir leurs silos à ras bord en attendant de trouver de nouveaux débouchés.

Ces tensions ont fragilisé l’idylle entre Trump et les territoires agricoles, traditionnels bastions républicains. Dernière source d’agacement : l’aide de 20 milliards de dollars versée à l’Argentine… qui avait fourni du soja à la Chine. Pour ajouter au malaise, le président avait même encouragé les achats de bœuf argentin. Ce n’est pas la première fois que la politique commerciale du milliardaire contrarie les agriculteurs. En 2018, Pékin s’était déjà détourné du soja américain pour faire pression sur Washington.

Victoire symbolique

Face à cette détresse, le président n’a pas fait la sourde oreille. Début octobre, il a évoqué l’idée de redistribuer une partie des recettes douanières aux exploitants agricoles. A Busan, cette fois, il a arraché une concession sur les achats de soja. Mais en réalité, « l’objectif des Etats-Unis était simplement d’amener la Chine à racheter ce qu’elle achète habituellement, rappelle Brad Setser, chercheur au Council on Foreign Relations et ancien conseiller auprès du représentant américain au Commerce. L’accord sur le soja est présenté comme une victoire symbolique par Trump, mais objectivement, il ne s’agit pas d’une réalisation majeure ».

D’autres sujets, aussi cruciaux, ont été mis de côté. Quid de l’épineuse question de Taïwan ? Donald Trump a confirmé qu’elle n’a pas été abordée. Quant à la guerre en Ukraine – autre sujet de discorde entre les deux puissances –, elle n’a abouti qu’à des promesses floues de « travailler ensemble ». Sur les terres rares, la détente demeure fragile, puisque limitée à un an.

Reste enfin l’incertitude sur la mise en œuvre de cette opération soja car aucun document n’est formellement signé. « Pour l’instant, il faut considérer le retour des achats chinois comme une option et non comme un nouveau régime, nuance Ruben Dalfovo, stratégiste à Saxo banque. Si les cargaisons américaines restent compétitives en termes de prix et de fret, les volumes vers la Chine pourront augmenter. Sinon, le Brésil conservera son avance ». L’Amérique a gagné une manche. Pas encore la guerre commerciale.



Source link : https://www.lexpress.fr/economie/politique-economique/guerre-commerciale-le-soja-trophee-diplomatique-de-donald-trump-face-la-chine-CNUF6KJNWVHSXPB75LE3NDRLNI/

Author : Tatiana Serova

Publish date : 2025-10-31 05:00:00

Copyright for syndicated content belongs to the linked Source.