Depuis le depuis de la guerre, en avril 2023, octobre 2025 a été le mois le plus sanglant au Soudan, l’un des plus grands pays d’Afrique en superficie. Selon des données de l’ONG Acled, qui répertorie les victimes de conflits à travers le monde, près de 1 545 civils ont été tués en l’espace de quatre semaines. 3 000 en dénombrant les combattants de part et d’autre. Le Conseil de sécurité des Nations unies (ONU) a exprimé, jeudi 30 octobre, sa « profonde inquiétude » sur l’ »escalade » dans le pays, indiquant détenir des « informations crédibles d’exécutions de masse ».
Ce conflit, qui a déjà fait plus de 150 000 morts depuis 2023 est également devenu la plus grave crise humanitaire du monde selon les Nations unies, alors que près de 13 millions de personnes ont été déplacées par les combats et que la moitié des 44 millions de Soudanais sont au bord de la famine, raconte le correspondant du journal Le Monde en Egypte dans un suivi quotidien de cette guerre oubliée.
Qui sont les belligérants ?
Depuis le 15 avril 2023, le Soudan, frontalier du Tchad et de l’Egypte, est déchiré par une guerre opposant l’armée, qui contrôle l’est et le nord du pays, et un groupe de paramilitaires, les Forces de soutien rapides (FSR), désormais maîtres de l’ensemble du Darfour, vaste région de l’ouest du pays, grande comme la France. Les deux factions militaires rivales, avec à leur tête le général Abdel Fattah Abdelrahman Al-Bourhane, commandant de l’armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d’Etat de 2021, et le général Mohammed Hamdan Daglo, à la tête des FSR, se déchirent depuis 2023, « pour savoir qui dirigera le Soudan », explique dans une interview à l’Institut français de relations internationales Thierry Vircoulon, chercheur associé au Centre Afrique subsaharienne de l’Ifri. Les FSR sont issues des milices arabes Janjawid, initialement créées pour combattre les groupes rebelles.
A ces deux principaux belligérants s’ajoutent de nombreuses milices. « Depuis le début du conflit, chaque camp mène une politique d’alliances avec des milices locales et a créé sa coalition guerrière afin de contrôler le maximum d’Etats », explique Thierry Vircoulon auprès de l’Ifri. Un phénomène qui contribue à fragmenter davantage le pays et exacerbe les tensions intercommunautaires.
Que s’est-il passé à El-Fasher ?
Après 18 mois de siège, les FSR ont pris le 26 octobre dernier la localité d’El-Fasher, dernière grande ville du Darfour qui échappait encore à leur contrôle. Depuis, c’est une situation apocalyptique qui est décrite par de rares images satellites et témoignages d’humanitaires. La ville a subi des dizaines de bombardements pendant plusieurs semaines. Le Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme dit avoir reçu « des témoignages effroyables faisant état d’exécutions sommaires, de massacres, de viols, d’attaques contre des travailleurs humanitaires, de pillages, d’enlèvements et de déplacements forcés » perpétrés par les paramilitaires entrés dans la ville. Des habitants survivants ont également raconté à l’ONG Médecins Sans Frontières que les habitants d’El-Fasher avaient été séparés en fonction de leur âge, de leur sexe et de leur identité ethnique présumée, rapporte France 24. Quelques heures après la prise de la ville le 26 octobre, 460 personnes ont été tuées alors qu’elles avaient trouvé refuge dans une maternité de la ville, dont les patients, les médecins et infirmières, rapporte John Ochaibi, le coordinateur humanitaire de l’ONG Alima au Soudan, après du Monde. Lundi 3 novembre, le bureau du procureur de la Cour pénale internationale a averti que les atrocités commises à El-Fasher « pourraient constituer des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité ».
A El-Fasher et les localités environnantes, l’ONG Acled recense 2 176 morts pour le seul mois d’octobre, dont 1 385 civils. L’ONG prévient que ce bilan pourrait évoluer dans les semaines à venir en raison des difficultés de communication liées à la situation. Selon d’autres sources liées au pouvoir pro armée, plus de 2 000 civils ont été tués dans la ville fin octobre. De son côté, le Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme a alerté sur le « risque croissant d’atrocités motivées par des considérations ethniques » en rappelant le passé du Darfour, ensanglanté au début des années 2000 par les massacres et les viols des milices arabes Janjawid, dont sont issues les FSR, contre les tribus locales Massalit, Four ou Zaghawa.
Quelle implication des Emirats arabes unis ?
Très tôt dans le conflit, l’armée régulière du général Abdel Fattah Abdelrahman Al-Bourhane a accusé les Emirats arabes unis de soutenir les FSR avec l’envoi d’armes et de mercenaires via le Tchad, la Libye, le Kenya ou la Somalie, par voie terrestre ou aérienne. Abou Dhabi a toujours nié toute ingérence, néanmoins il existe des preuves fournies par des rapports internationaux et enquêtes OSINT fondées sur l’analyse de données accessibles à tous en ligne. Selon plusieurs observateurs, ce soutien des Emiratis aux paramilitaires des FSR s’expliquerait en partie en raison de la production d’or qui se trouve dans la région du Darfour, où les FSR sont majoritaires. « Les FSR exploitent cet or, pour être ensuite exporté illégalement vers Dubaï, qui est un centre mondial de transformation de l’or, avant qu’il soit expédié », expliquait ainsi en avril dernier Marc Lavergne, directeur de recherche émérite au CNRS, au laboratoire CITERS de l’Université de Tours auprès de France Culture.
Depuis la prise sanglante d’El-Fasher, les Emirats arabes unis se retrouvent pointés du doigt pour leur soutien aux FSR et des appels au boycott visant l’état du Golfe se multiplient sur les réseaux sociaux, note Radio France Internationale. Mardi 4 novembre, l’ambassadeur du gouvernement soudanais pro armé auprès de l’ONU a appelé la communauté internationale à faire pression sur les Emirats arabes unis. Le fournisseur d’armes est « bien connu. Il s’agit des Emirats arabes unis. Le Soudan appelle la communauté internationale à agir sans délai […] par une décision ferme et concrète ». En outre, le silence de la communauté internationale et notamment des pays occidentaux est de plus en plus pointé du doigt. « Un silence gêné, alors même que des armes européennes ont été livrées par les Emiratis aux paramilitaires FSR », explique Le Monde. Selon Amnesty International, des équipements militaires français fabriqués par les groupes KNDS France et Lacroix, censés équiper des véhicules blindés émiratis sont actuellement utilisés au Soudan, ainsi que des armes de fabrication britannique, selon The Guardian, canadiennes d’après The Globe and Mail et bulgares indique France 24.
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Publish date : 2025-11-04 17:19:00
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