Précommander un robot humanoïde domestique à 20 000 dollars ou 499 dollars par mois. Voici ce que propose la start-up d’origine norvégienne basée à Palo Alto, 1X Technologies, depuis octobre. Les premières livraisons du robot, baptisé Neo, sont prévues en 2026. Les démonstrations le montrent capable d’ouvrir des portes, de ranger des objets ou de plier du linge. Mais lors des tests, les performances de Neo déçoivent. Plus d’une minute pour récupérer une bouteille d’eau dans un réfrigérateur. Cinq minutes pour charger un lave-vaisselle. Deux minutes par pull à plier.
Et pour cause : Neo n’est pas autonome. Derrière chaque geste se cache un téléopérateur humain, quelque part dans le monde, qui pilote le robot à distance. Un casque de réalité virtuelle lui permet de visualiser l’intérieur de votre maison avec des garde-fous censés rassurer – floutage des personnes, zones interdites, accès sur consentement. La société entraîne son modèle d’IA Redwood – 160 millions de paramètres – sur ces données de télé opération réelles. Plus il y a d’utilisateurs, plus les données s’accumulent, plus le système apprend. Le parallèle avec Tesla Autopilot, qui a été déployé avec une supervision humaine, puis amélioré graduellement par accumulation de kilomètres, est évident.
Le robot Neo plie le linge
Neo n’est que la face visible d’un écosystème en pleine structuration. L’IA conversationnelle s’est nourrie du web, des milliards de pages de texte déjà disponibles. Pour l’IA physique, les catalogues open source actuels, comme DROID ou Open X-Embodiment, n’offrent ensemble que 5 000 heures de données d’interactions physiques. Largement insuffisant pour entraîner des modèles généraux. Il faut donc collecter une interaction à la fois, dans le monde réel. Scale AI revendique plus de 100 000 heures de production dans son laboratoire prototype de San Francisco, travaillant avec les leaders du secteur.
Physical Intelligence a filmé des robots pliant du linge par télé opération, passant de 0 % de réussite à cinq articles en douze minutes après entraînement. Figure AI s’est associé au géant immobilier Brookfield pour capturer des données dans 100 000 appartements et maisons qu’il possède aux Etats-Unis, a priori des données spatiales sur la configuration des bâtiments.
Dans la ville industrielle de Karur, au sud de l’Inde, la société Objectways, créée en 2018, emploie 2 200 personnes dont la moitié labellise des données pour robots et voitures autonomes. Des ingénieurs passent leurs journées à plier des serviettes avec une GoPro fixée sur le front. Si un pli prend plus d’une minute ou dévie du protocole, ils recommencent. Chaque geste est annoté : bras gauche ou droit, direction du mouvement, classification de la préhension.
Des humains à distance pour guider les robots
En octobre, l’entreprise chinoise RealMan Robotics a dévoilé une télé opération entre son siège à Beijing et la conférence IROS à Hangzhou, soit 1 200 kilomètres de distance, de plus de cent robots déployés dans dix environnements réels et collectant en continu des données multimodales. Le marché global de la télé opération et de la robotique à distance pesait déjà un demi-milliard de dollars en 2024. Les projections l’estiment à 4,7 milliards en 2035.
Certains pays choisissent une autre stratégie. Au Japon, l’AI Robot Association, créée en décembre 2024, agrège les données de télé-opération de ses membres pour entraîner des modèles fondamentaux partiellement open source. En Chine, les entreprises de robotique mettent certaines de leurs bibliothèques de mouvements en libre accès. Fourier Intelligence, basée à Shanghai, a publié Fourier ActionNet, un ensemble de données pour robots humanoïdes, avec 30 000 entrées d’entraînement de haute qualité. AgiBot, basée à Shanghai, a lancé le sien, baptisé AgiBot Digital World, qui comprend plus d’un million de trajectoires d’actions de 100 robots en situation réelle. Quant à Unitree, basée à Hangzhou, elle a publié un jeu de données couvrant l’ensemble du corps de ses robots H1 et G1.
Le gouvernement provincial de Beijing a inauguré, dans le district de Shijingshan, un camp d’entraînement de 10 000 m² pour robots humanoïdes, où les machines sont testées dans une variété de scénarios. On y récolte une foule d’informations d’apprentissage dans le cadre de seize scénarios reproduisant une usine, un point de vente, un centre de soins pour personnes âgées ou encore une maison intelligente. Données qui seront ensuite vendues à prix subventionné aux entreprises du secteur. De quoi faire passer les robots domestiques du statut de gadget à celui d’utile compagnon.
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Author : Robin Rivaton
Publish date : 2025-11-08 07:00:00
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