L’anniversaire des dix ans de l’accord de Paris qui devait limiter le réchauffement climatique bien en dessous de 2 °C (tout en poursuivant les efforts pour le contenir à 1,5 °C) se fêtera au Brésil à Belém à partir du 10 novembre. La COP 30 marquera donc un premier bilan à long terme de la volonté de près de 200 pays dans leurs politiques pour réduire leurs gaz à effet de serre. Plutôt que regarder le verre à moitié vide – non, le monde ne réussira pas à atteindre dans les temps l’objectif de contenir le réchauffement à 1,5 °C par rapport à l’ère préindustrielle -, nous avons choisi à L’Express le verre à moitié plein en nous focalisant sur ces entreprises françaises qui se battent pour décarboner l’industrie. Dans l’énergie (solaire, photovoltaïque, hydrogène), les transports, le secteur du BTP, à la sortie des usines ou, enfin, pour planter des arbres. Autant d’exemples inspirants parce que le monde bouge et multiplie les petits efforts en espérant de grands résultats pour préserver un peu notre planète unique.
Le projet a fait couler beaucoup d’encre. Aujourd’hui, le chantier de la Tour Triangle à Paris entre dans sa dernière ligne droite et on y coule surtout du béton. Et pas n’importe lequel : pour atteindre ses 180 mètres de hauteur, ses concepteurs utilisent des parpaings bas-carbone. Conçus par la start-up landaise Matterup, ils permettront d’émettre, 44 % de CO2 en moins par rapport à une construction traditionnelle.
Un des matériaux les plus polluants
Une prouesse technologique mais qui représente une goutte d’eau par rapport aux quatorze milliards de mètres cubes de béton produits chaque année selon l’Association mondiale du ciment et du béton (GCCA) – ce qui en fait le matériau manufacturé le plus consommé ! Mais aussi l’un des plus polluants : son ingrédient principal, le ciment, génère environ 7 % des émissions de CO2 sur la planète. Pratiquement trois fois plus que l’aviation.
Le coupable ? Le clinker, un constituant majeur dont le processus de fabrication génère l’immense majorité de l’empreinte carbone du ciment. Pour créer cette poudre, il faut en effet chauffer à 1 450 degrés un mélange d’argile et de calcaire, une opération qui, au-delà de la consommation énergétique des fours, provoque une réaction chimique appelée « décarbonatation » particulièrement néfaste pour l’environnement.
Des freins psychologiques
Le secteur du BTP multiplie donc les initiatives pour réduire sa proportion dans le ciment. Materrup a ainsi conçu une recette d’activation à froid, protégée par 80 brevets mais gardée secrète, contenant jusqu’à 70 % d’argile crue – contre 5 % traditionnellement. « Une matière première extrêmement abondante sur Terre. Pour preuve, le nôtre provient de déchets d’une tuilerie voisine », confie Julie Neuville, la présidente de cette société qui revendique plus de 400 chantiers depuis sa création en 2018.
En Vendée, l’entreprise Hoffmann Green a mis au point une solution plus radicale encore : se passer de clinker ! Fondée il y a dix ans, elle utilise des coproduits industriels non valorisés : cendres papetières, argile, gypse ou encore laitiers de hauts fourneaux. Un modèle d’économie circulaire qui divise par cinq les émissions de CO2 par rapport au ciment traditionnel, pour un prix et des performances similaires.
Toutefois, les volumes de la PME vendéenne restent encore modestes (20 000 tonnes), malgré un triplement de ses ventes au premier semestre 2025. « Les freins sont plus psychologiques que technologiques ou commerciaux », estime son cofondateur Julien Blanchard. Difficile en effet de changer les habitudes sur ce marché réputé conservateur.
Un objectif qui n’a rien d’extravagant
Après avoir levé 100 millions d’euros Hoffmann Green ambitionne de capter 5 % des 15 millions de tonnes du marché français d’ici à 2030. Un objectif qui n’a rien d’extravagant puisque l’ensemble des cimentiers, poussés par des contraintes environnementales, doivent investir dans ces technologies bas-carbone. D’abord au niveau européen, où le système de quotas gratuits de CO2 va progressivement s’éteindre d’ici à 2034, au profit d’une taxe carbone aux frontières. Ensuite, en France puisque la réglementation environnementale sur la construction neuve (RE2020) fixe des seuils d’émission de plus en plus restrictifs.
« Au-delà de ces incitations économiques, les solutions techniques de décarbonation existent et, contrairement à l’acier, la menace d’une hausse des importations ou des délocalisations reste faible pour le béton. Ce n’est qu’une question de rythme d’investissements « , assure Éric Bergé, chef de projet industrie au think tank Shift Project. Avant de conclure : « Je n’aurais pas dit cela, il y a quelques années, mais je suis optimiste sur la capacité du secteur à se décarboner ! ».
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Author : Kevin Deniau
Publish date : 2025-11-12 09:00:00
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