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Pologne, Grèce… Comment ces pays européens se réarment déjà

Pologne, Grèce… Comment ces pays européens se réarment déjà

En Europe, la scène a provoqué une déflagration. Après la rencontre ratée entre le président ukrainien Volodymyr Zelensky et Donald Trump ce vendredi 28 février, les Européens se sont mis en ordre de marche pour rappeler leur soutien à l’Ukraine. Et se préparer à un monde où leur allié de toujours quitterait l’Otan. D’abord, il y a eu le sommet de Londres pendant le week-end, lors duquel une quinzaine de pays a réaffirmé son soutien à Kiev. Puis, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a annoncé la mise en œuvre d’un plan de 800 milliards de dollars – 50 milliards de plus que le plan de relance post-Covid – pour « réarmer l’Europe », quelques jours avant l’organisation d’un sommet extraordinaire à Bruxelles.

La donne a changé et chaque dirigeant européen s’est fendu d’une déclaration de principe qui va dans le sens d’une augmentation des capacités stratégiques et militaires. Dans une interview au Figaro, le président français Emmanuel Macron a ainsi plaidé pour que les Etats européens membres de l’Otan augmentent leurs dépenses de défense à « 3, 3,5 % du PIB ». Dans la plupart des cas, ils en sont encore loin.

Au premier rang, seuls quatre pays font figure de « bons élèves » avec un budget dédié à la défense qui vaut entre 3,08 et 4,12 % de leur PIB. L’un d’entre eux – la Grèce – a accru son budget militaire dès 2020 tandis que les trois autres – la Pologne, l’Estonie et la Lettonie – ont accéléré à partir de l’invasion de l’Ukraine par la Russie en 2022. La Lituanie s’en approche et devrait dépasser ce seuil symbolique en 2025.

Le point commun de tous ces Etats ? Tous disposent d’une frontière terrestre avec la Russie. Les autres pays européens, plus éloignés de Moscou, sont bien loin derrière, notamment nos voisins belges et espagnols qui n’atteignent même pas le seuil de 2 %. Depuis 2014 pourtant, c’est un prérequis pour tous les pays membres de l’Otan.

Pour s’émanciper progressivement des Américains, tous vont devoir accroître leurs efforts. Mais augmenter ainsi le budget des armées n’est pas sans conséquences, ni sur la dette publique, ni sur les autres volets de la dépense publique.

La « pré-économie de guerre » des pays frontaliers

On en parle depuis des mois : la situation budgétaire de la France est particulièrement critique. Avec un déficit équivalent à 5,5 % du PIB et une dette publique qui dépasse très largement les 3 000 milliards d’euros, Paris se trouve bien loin des critères du traité de Maastricht (une dette publique inférieure à 60 % du PIB et un déficit maîtrisé, en deçà des 3 %). Ce n’est pas le cas des trois pays frontaliers qui sont parvenus à augmenter le budget de leur défense moyennant un accroissement du déficit.

En 2022 et 2023, la Pologne, l’Estonie et la Lettonie ont en effet enregistré un déficit bien plus important que lors de la période pré-Covid. Mais pour deux d’entre eux, c’est la première fois qu’ils dépassaient la barre symbolique des 3 % depuis le début des années 2010. La première fois depuis 2014 dans le cas de Varsovie. Par ailleurs, même avec des dépenses militaires relevées, aucun de ces pays n’a une dette publique supérieure à 50 % de leur production nationale.

Il n’empêche, cette hausse des dépenses liées au budget de la défense s’est accompagnée de sacrifices, notamment une modification des régimes fiscaux en vigueur. En Estonie par exemple, la TVA a été rehaussée de 20 à 22 % et les taux d’accises sur l’alcool, le tabac et les jeux d’argent ont aussi été augmentés. Même scénario en Lettonie, où le taux de taxation des microentreprises a été ajusté à la hausse pour atteindre 25 %.

A noter qu’aucun de ces pays n’a baissé ses dépenses sociales pour financer ses dépenses militaires, bien au contraire. En Pologne notamment, le gouvernement a maintenu le plafonnement des prix de l’énergie et décidé d’augmenter les salaires des enseignants et des employés de l’administration publique. Mais là encore, ces mesures ont été rendues possibles par une croissance économique performante et une maîtrise historique des dépenses publiques. Dans des pays plus exsangues sur le plan budgétaire, des arbitrages compliqués devront certainement avoir lieu.

La Grèce, un cas spécifique

Historiquement, la Grèce a toujours eu des dépenses de défense particulièrement élevées par rapport à ses partenaires de l’Union européenne. La raison principale : sa proximité géographique avec la Turquie, son ennemi historique. Aujourd’hui, Athènes et Ankara sont alliées au sein de l’Otan, cela n’a jamais empêché la Grèce de maintenir son budget militaire à un niveau élevé.

Dans son budget 2025 d’ailleurs, le gouvernement du conservateur Kyriákos Mitsotákis a décidé d’augmenter les dépenses de défense de 3,6 à 6,17 milliards d’euros, ce qui devrait une fois encore, faire d’Athènes un des « meilleurs élèves » de l’Otan.



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Author : Mathias Penguilly

Publish date : 2025-03-05 18:30:00

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