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Ventes de livres : Laure Murat aurait-elle trouvé la recette gagnante ?

Ventes de livres : Laure Murat aurait-elle trouvé la recette gagnante ?


Dans un monde où les bons lecteurs forment une espèce en voie de disparition, Laure Murat avait réalisé un véritable exploit en 2023 avec Proust, roman familial (Robert Laffont) : vendre 50 000 exemplaires d’un essai très pointu sur l’auteur de La Recherche. A titre de comparaison, Catherine Cusset n’en est qu’à 4 000 exemplaires avec son récit pourtant excellent, Ma vie avec Proust (Gallimard), paru en début d’année. Laure Murat aurait-elle trouvé la recette d’une pensée exigeante sachant trouver un large public ? Elle revient dans l’actualité avec Toutes les époques sont dégueulasses (Verdier), déjà écoulé à 8 000 exemplaires en quelques semaines, où elle s’interroge sur notre tendance actuelle à réécrire les classiques et les best-sellers du passé pour les purger du racisme ou du sexisme. Si, avec la finesse qui la caractérise, elle pose dans ce bref texte de nombreuses questions, nous en retiendrons deux ici. Ne s’agirait-elle avant tout que de business dans ces rééditions revues et corrigées ? Et sommes-nous vraiment plus moraux que les générations précédentes ?

Si l’on en croit le palmarès des meilleures ventes d’essais, où Laure Murat se classe 11e, notre monde ne tourne pas rond. Des manigances de Jean-Luc Mélenchon brocardées par Olivier Pérou et Charlotte Belaïch dans La Meute (Flammarion) aux pratiques des tout-puissants dépeintes par Giuliano da Empoli dans L’Heure des prédateurs (Gallimard), en passant par l’autoportrait en bipolaire de Nicolas Demorand dans Intérieur nuit (Les Arènes), les nouvelles des uns et des autres ne sont pas rassurantes. Si Salomé Saqué nous invite à Résister (Payot), Jean-Pierre Filiu avec Un historien à Gaza (Les Arènes) et Pierre Jovanovic avec 2008 (Le Jardin des Livres), sur la crise financière de cette année-là, ne nous remontent guère le moral.

Et du côté des romans ?

Aller faire un tour du côté des romans est-il la solution pour retrouver l’espoir en l’espèce humaine ? La domination semaine après semaine de la graphomane Freida McFadden, publiée chez First, est un peu décourageante. Bien arrimé à la 2e place, le talentueux Raphaël Quenard continue de séduire les lecteurs (plus de 50 000 exemplaires !) grâce à Clamser à Tataouine (Flammarion). Ce livre inventif et drôle fait du bien – même s’il y est question d’un serial killer.

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Retenons aussi Adèle Yon, qui poursuit sur sa lancée avec Mon vrai nom est Elisabeth (Le Sous-Sol). Lauréate du tout nouveau prix littéraire du Nouvel Obs (généreusement doté de 20 000 euros par la maison Chanel), elle vient de décrocher le plus établi Grand prix des lectrices de ELLE dans la catégorie non-fiction. Citons enfin Sylvain Tesson et ses Piliers de la mer (Albin Michel) : 60 000 lecteurs l’ont déjà suivi de l’île de Pâques aux Highlands, et des Marquises aux Faraglioni de Capri, dans sa découverte pleine de style et d’esprit d’une centaine de stacks. Qu’on préfère l’humour potache (Quenard), l’enquête psychogénéalogique (Yon) ou l’aventure poétique (Tesson), voici trois bonnes raisons de ne pas sombrer dans la dépression face à la dégueulasserie de notre temps.



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Author : Louis-Henri de La Rochefoucauld

Publish date : 2025-06-20 16:00:00

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