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« Adolescence » : faut-il diffuser cette série dans les écoles françaises ?

« Adolescence » : faut-il diffuser cette série dans les écoles françaises ?

Quatre épisodes en plan-séquence, suffocants, pendant lesquels le spectateur suit un garçon de 13 ans accusé de meurtre. Quatre heures qui tournent autour d’une question : pourquoi ? Adolescence, la mini-série inspirée de faits réels survenus au Royaume-Uni, est numéro 1 mondial sur Netflix depuis sa sortie le 13 mars. Elle raconte la radicalisation de Jamie, séduit par les discours masculinistes en ligne depuis sa chambre d’enfant, là où tous le pensaient en sécurité derrière son ordinateur. « Qu’est-ce qu’il pouvait faire de mal là-dedans ? », se questionnera son père.

Une fiction qui ébranle la société britannique

« La série est très réaliste. On voit le manque de formation des encadrants, les références aux différentes mouvances masculinistes, l’effacement des femmes… Seul bémol : l’âge de l’auteur. Si ces discours ciblent de très jeunes garçons, le passage à l’acte violent intervient, en général, quelques années plus tard », détaille la chercheuse Stéphanie Lamy*, spécialiste des guerres de l’information.

Au Royaume-Uni, la fiction a ébranlé la société britannique jusqu’à son Premier ministre, Keir Starmer, qui a annoncé une mesure exceptionnelle : la diffusion de la fiction dans les collèges et lycées britanniques. En France, la ministre de l’Education nationale, Elisabeth Borne, interrogée ce 3 avril sur France 2, a reconnu la nécessité de « sensibiliser tous les élèves aux risques des réseaux sociaux, de la violence, du sexisme ». Mais ce ne sera pas par le biais d’Adolescence. » « On a beaucoup de ressources pédagogiques », a-t-elle justifié.

La question du support se pose. « Dans le cadre de l’école, il faut que le visionnage soit accompagné d’un vrai débat avec des professionnels habitués à parler à un jeune public », explique Stéphanie Lamy. Une discussion qui devrait avoir lieu, dans ce cas spécifique, en mixité, selon la spécialiste du masculinisme : « Face à la radicalité, il faut éviter de parler d’hommes à hommes, et faire entendre la voix des femmes pour lutter contre ce qui fonde l’idéologie elle-même. Le tout dans le cadre d’une pédagogie anti-sexiste plus globale. »

« Les adolescents ont besoin de modèles masculins positifs »

Un indispensable aussi pour Christine Castelain-Meunier*, sociologue au CNRS : « Il faut un contre-pied à la diffusion d’une série comme celle-ci, avec une représentation positive de la masculinité. Par le biais d’autres outils, d’autres fictions, mais pas uniquement. La pédagogie ne peut pas être que sidérante ou divertissante. Par ailleurs, l’image crée de la distance. Il faut aussi penser des espaces d’échange avec, par exemple, des psychologues ou des éducateurs respectueux de l’égalité des droits entre femmes et hommes. »

C’est aussi cela que pointe la série Netflix : l’importance de l’éducation des garçons, en particulier, face au sexisme. « Les adolescents ont besoin de modèles masculins positifs pour s’affirmer face aux contradictions de la société, estime Christine Castelain-Meunier. Ils voient des comportements machistes valorisés, alors même qu’on leur demande de ne pas les reproduire. » Et si « Adolescence » était un début ?

* « La terreur masculiniste » (éditions du Détour).

** « Et si on réinventait l’éducation des garçons ? Petit manuel pour dépasser les stéréotypes et élever des garçons libres et heureux » (Nathan)



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Author : Ide Parenty

Publish date : 2025-04-12 10:30:00

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