Les 25 heures de discours du sénateur démocrate Cory Booker, entre le 31 mars et le 1er avril, ont-elles provoqué l’effet escompté, à savoir réveiller l’opposition et mobiliser la base démocrate ? Toujours est-il qu’après de longues semaines de silence, l’heure semble désormais être à l’action pour les démocrates américains.
Le parti d’opposition, minoritaire dans les deux chambres du Congrès, tente de retrouver sa voix avant les élections de mi-mandat, en novembre 2026, alors qu’il obtient seulement 27 % d’opinion favorable au sein de l’électorat américain, selon un sondage réalisé par NBC News il y a un mois (le score le plus bas depuis 1990).
Des milliers de rassemblements anti-Trump
Samedi 12 avril, la députée démocrate Alexandria Ocasio-Cortez et le sénateur indépendant socialiste Bernie Sanders ont réuni 36 000 personnes à Los Angeles, à l’occasion d’un rallye pour la tournée « Combattre l’oligarchie » du sénateur américain. Un succès que la chaîne américaine CCN attribue en grande partie à la déception des électeurs démocrates vis-à-vis de leurs représentants, « à un moment où la base démocrate exige que les dirigeants repoussent avec plus de force les actions de l’administration Trump ». Or, le parti a du mal à afficher une ligne claire. « De quel moyen de pression disposons-nous ? », s’est ainsi plaint le mois dernier le chef de la minorité démocrate de la Chambre des représentants, Hakeem Jeffries, à propos de l’impuissance démocrate face à la majorité républicaine au Congrès, rapporte le Los Angeles Times. Il faut bien leur accorder ceci : minoritaires dans les deux chambres du Congrès, les démocrates ont peu de chance de parvenir à imposer leurs vues face au tonitruances du camp d’en face.
Déçus par cette inaction, les militants se remobilisent différemment. Le succès de la tournée de Bernie Sanders s’inscrit ainsi dans la lancée des 1 300 rassemblements anti-Trump baptisés « Hands off ! » (en français, « Bas les pattes ! » ou « Pas touche ») qui se sont déroulés simultanément le 5 avril dans une cinquantaine d’Etats américains – et même ailleurs dans le monde, notamment à Paris où se sont réunies environ 3 millions de personnes. L’action était menée par une coalition nationale d’environ 150 organisations, parmi lesquelles l’organisation anti-Trump et pro-démocratie Indivisible, ainsi que des associations de défense des droits civiques, des droits des femmes, des personnes LGBTIQ +, d’anciens combattants ou encore de syndicats.
Barack Obama et Kamala Harris sortent de leur réserve
A leur tour, les grandes figures démocrates que sont Barack Obama et Kamala Harris se sont finalement exprimées. « C’est la première fois que je parle en public depuis un moment, j’observais », a déclaré l’ancien président américain lors d’une conférence au Hamilton College à New York, avant d’en profiter pour tacler son successeur : « Imaginez si j’avais fait ce qu’ils ont fait ? Imaginez si j’avais retiré à Fox News son accréditation à la Maison-Blanche ? », s’est-il indigné, avant de souligner que pour lui, « la fonction la plus importante dans une démocratie, c’est celle du citoyen ». Il a également déclaré que les droits de douane n’étaient pas « bénéfiques pour l’Amérique ».
Kamala Harris, de son côté, a estimé lors d’un sommet consacré aux femmes, que « nous voyons des organisations rester silencieuses », et que si la peur est contagieuse, le courage l’est lui aussi.
Fear has a way of being contagious.
But courage is also contagious. pic.twitter.com/YaEZfIJ1Zc
— Kamala Harris (@KamalaHarris) April 7, 2025
Une enquête demandée sur un possible délit d’initié
Autre voie par laquelle les démocrates espèrent se faire entendre : la justice. Des sénateurs démocrates ont demandé vendredi 11 avril au gendarme boursier américain (la Securities and Exchange Commission ou SEC) de déterminer si Donald Trump avait commis une infraction en encourageant l’achat d’actions, par un message sur les réseaux sociaux, juste avant son revirement spectaculaire sur les droits de douane. Mercredi matin, après deux jours d’effondrement des bourses en raison de ses annonces sur les droits de douane supplémentaires à l’encontre de divers pays, il avait écrit sur sa plateforme Truth Social : « C’EST LE BON MOMENT POUR ACHETER ». Or, quelques heures plus tard seulement, il annonçait une suspension pour 90 jours de ces droits de douane supplémentaires, provoquant un rebond boursier historique.
Les six sénateurs souhaitent que la SEC vérifie si « des proches, y compris la famille du président, ont eu préalablement connaissance de la pause tarifaire et ont effectué des transactions boursières avant l’annonce du président ». Pour rappel, cette méthode, que l’on appelle un délit d’initié, est illégale. Le sénateur Adam Schiff a aussi demandé une enquête jeudi au Bureau pour l’éthique gouvernementale (Office of Government Ethics, OGE), une agence fédérale indépendante, et à la cheffe de cabinet de la Maison-Blanche.
Reste à savoir si toutes ces actions vont suffire à convertir des soutiens en voix d’électeurs pour les élections de mi-mandat, en novembre 2026. « Ce dont les démocrates ont besoin, ce sont de nouvelles voix influentes », analyse dans Le Devoir Christophe Roy-Cloutier, directeur adjoint de l’Observatoire sur les États-Unis à l’université de Laval au Québec. « C’est un problème depuis longtemps au Parti démocrate, qui ressemble à une gérontocratie qui se renouvelle très peu », ajoute-t-il.
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Publish date : 2025-04-13 16:11:00
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