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Droits de douane : ces cinq petites entreprises qui ont mis un frein à la machine Trump

Droits de douane : ces cinq petites entreprises qui ont mis un frein à la machine Trump

Elles ne figurent pas dans le classement « Fortune 500 ». Elles n’ont ni lobbyistes influents, ni sièges sociaux dans des gratte-ciel new-yorkais. Et pourtant, ce sont elles qui ont infligé un revers spectaculaire à la politique commerciale de Donald Trump. Cinq petites entreprises, épaulées par une association, sont parvenues à faire reculer, du moins temporairement, les tarifs douaniers « réciproques » de Donald Trump, imposés en avril dernier.

Mercredi 28 mai, la Cour fédérale du commerce international a bloqué les tarifs mondiaux imposés par le président américain. Dans sa décision, elle affirme que les lois d’urgence invoquées, notamment l’International Emergency Economic Powers Act (IEEPA), ne confèrent pas au président le pouvoir unilatéral d’imposer des droits de douane à l’échelle planétaire. Une prérogative qui appartient exclusivement au Congrès selon la Constitution américaine. Ce jugement fait suite à une plainte déposée le 14 avril par l’association Liberty Justice Center, intentée au nom de cinq petites entreprises américaines durement touchées par les droits de douane.

Une société importatrice de vins et un grossiste d’articles de pêche parmi les entreprises

Ces cinq sociétés, toutes issues de secteurs très différents, ont été réunies par l’association Liberty Justice Center. Leur point commun ? Avoir été brutalement touchées par les surtaxes imprévisibles imposées par Donald Trump, et par l’instabilité qu’elles ont semée dans l’économie.

C’est notamment le cas de VOS Selections, une société new-yorkaise spécialisée dans l’importation de vins et spiritueux. Présente sur le marché depuis près de 40 ans, elle a vu ses clients repousser ou annuler leurs commandes en raison de l’incertitude tarifaire. Le coût est immédiat : flux de trésorerie sous pression, impossibilité de fixer des prix à l’avance, partenaires fragilisés. « Ces tarifs menacent de démanteler tout ce que nous avons bâti en une génération », déplore la société dans le Time Magazine.

La même angoisse traverse FishUSA, détaillant et grossiste d’articles de pêche installé en Pennsylvanie. Très dépendante des importations asiatiques, l’entreprise a vu ses fournisseurs hausser leurs prix par anticipation. « Nous essayons de rester compétitifs, mais ces tarifs rendent toute planification ou croissance pratiquement impossible », résume-t-elle dans un communiqué publié avant la décision du tribunal.

À des centaines de kilomètres de là, dans un petit atelier de Virginie, David Levi dirige MicroKits, une entreprise éducative qui conçoit des kits électroniques pour enfants. Le produit phare permet de construire un instrument de musique à partir de composants simples. Mais comment anticiper les coûts de ces composants quand les tarifs peuvent doubler entre la commande et la livraison ? « Je ne peux pas planifier. Je ne peux pas budgéter. Je ne peux pas grandir », confie-t-il dans un communiqué publié par le Liberty Justice Center, décrivant les tarifs comme une « peine de mort économique » pour son activité.

Même son de cloche du côté de Terry Precision Cycling, entreprise pionnière du cyclisme féminin. Pour son fondateur Nik Holm, ces droits de douane imprévisibles représentent « la plus grande menace » à laquelle la société ait été confrontée depuis sa création. L’impact est chiffré : 25 000 dollars de droits de douane déjà versés, et jusqu’à 1,2 million prévus d’ici 2026, une somme insupportable pour une entreprise de cette taille. L’enjeu, selon Nik Holm, dépasse alors le simple bilan comptable : Il s’agit de « défendre le droit de construire et de gérer une entreprise sans craindre les caprices du gouvernement. »

Enfin, Genova Pipe, basée dans l’Etat de Washington, illustre les conséquences sur le secteur industriel. L’entreprise importe de la résine d’Asie pour fabriquer des tuyaux exportés au Canada. Les tarifs imposés gonflent le coût des matières premières, ce qui la rend moins compétitive face aux fournisseurs locaux canadiens. Et là encore, trouver des alternatives américaines à court terme est irréaliste. Pour le président Andrew Reese, les décisions de Donald Trump menacent l’accès même au marché d’exportation.

Une coalition de douze Etats

Ces témoignages ne sont pas restés sans écho. Une coalition de douze Etats, menée par le procureur général de l’Oregon Dan Rayfield, a intenté une seconde poursuite parallèle, dénonçant une politique « illégale, imprudente et économiquement dévastatrice ». Dan Rayfield souligne que la Constitution ne permet pas à un président de manipuler à lui seul l’économie nationale. « Cette décision réaffirme que nos lois comptent, et que les décisions commerciales ne peuvent être prises à la légère », a-t-il affirmé en réaction à la victoire du 28 mai.

Le temps est désormais compté. Washington a immédiatement fait appel, obtenant in extremis une suspension temporaire de l’exécution de la décision par une Cour d’appel. Donald Trump pourra donc, pour l’instant, continuer à percevoir ses droits de douane.



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Author : Aurore Maubian

Publish date : 2025-05-30 13:00:00

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