L’Express

Wagner se retire du Mali : qu’est-ce que l’Africa Corps, le groupe paramilitaire qui prend son relais ?

Wagner se retire du Mali : qu’est-ce que l’Africa Corps, le groupe paramilitaire qui prend son relais ?

Un changement de nom, mais pas d’objectif. Après trois ans de présence au Mali, les mercenaires russes du groupe Wagner plient bagage. Il passe le relais à Africa Corps, un autre groupe paramilitaire tenu plus fermement par le Kremlin. Cette faction, dont un premier contingent d’environ 200 paramilitaires d’Africa Corps avait été dépêché à Bamako en décembre 2024, compte aujourd’hui plus de 1 500 hommes, d’après des sources sécuritaires occidentales. Sa mission ? Prolonger l’influence russe au Sahel, tout en reprenant le contrôle direct sur les opérations, après la mort d’Evgueni Prigojine, fondateur de Wagner, en août 2023, et sa rébellion avortée contre le Kremlin.

Pour rappel, le Mali, pays pauvre d’Afrique de l’Ouest dirigé par une junte, est en proie aux agissements de groupes jihadistes. Les militaires au pouvoir se sont éloignés des anciens alliés occidentaux pour se tourner militairement et politiquement vers la Russie. À la différence de Wagner, qui jouissait d’une relative autonomie, avec une gestion plus opaque, Africa Corps est une structure étroitement supervisée par Moscou, dont l’organisation est plus rigide et centralisée. C’est le ministre russe de la défense qui pilote désormais les opérations.

À noter que plusieurs ex-chefs emblématiques de Wagner ont été recyclés dans ce nouveau dispositif : Andreï Ivanov, Ruslan Zaprudsky ou encore Alexander Kuznetsov, connus pour leur rôle dans les précédents théâtres d’opérations en Ukraine, en Syrie ou en Libye. Selon des échanges sur des canaux Telegram fréquentés par des mercenaires russes, 70 à 80 % des hommes d’Africa Corps seraient d’anciens de Wagner, rejoints par de nouvelles recrues plus jeunes, venues combler les pertes et renforcer les effectifs. En parallèle, la Russie a livré au Mali, en janvier 2025, plus d’une centaine de véhicules militaires, dont des chars et des blindés, pour renforcer son dispositif militaire, selon nos confrères du Monde.

« Aucun changement »

Si Wagner avait su tisser des liens directs avec certains militaires maliens et offrait des services jugés « souples et efficaces », Africa Corps inspire un scepticisme certain. Plusieurs officiers bamakois déplorent un dispositif plus rigide, au fonctionnement plus bureaucratique. Les probables avantages financiers informels qui circulaient sous Wagner pourraient aussi se tarir, avance prudemment le Monde. Pourtant le message officiel reste inchangé. Sur sa chaîne Telegram, vendredi 6 juin, Africa Corps affirme que le départ de Wagner ne modifiera en rien la présence russe. Ses administrateurs l’affirment : lcela « n’entraînera aucun changement », ajoutant que « la Russie ne perd pas de terrain, mais continue, au contraire, à soutenir Bamako à un niveau plus fondamental ».

De son côté, Wagner se félicite de son bilan au Mali, estimant avoir rempli « sa tâche principale », alors que de larges pans du territoire restent pourtant sous contrôle des groupes djihadistes. Certes la milice se vante d’avoir aidé à reprendre la ville stratégique de Kidal au nord du pays, tombée entre les mains des groupes rebelles, mais l’insécurité règne toujours. Au début du mois de juin, le Mali a connu une recrudescence d’attaques attribuées aux jihadistes. D’après France 24, plusieurs régions du pays ont instauré ou étendu des couvre-feux. Dimanche 1er juin, c’était au moins 30 soldats qui avaient été tués dans le camp de Boulkessi, dans le centre du pays, dans une attaque revendiquée par le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (Jnim, de son acronyme en arabe).

Plus grave encore : Wagner a été accusé à plusieurs reprises d’exactions contre les civils. Des ONG internationales ont documenté des massacres, des arrestations arbitraires et des actes de torture lors d’opérations menées aux côtés des forces maliennes. Rien n’indique pour l’instant que la nouvelle mouture militaire opérera différemment. Loin de se désengager, le Kremlin profite de ce reformatage pour ancrer sa présence en Afrique dans un cadre plus étatique et durable. Après le Mali, d’autres pays comme le Centrafrique ou le Burkina Faso pourraient voir Africa Corps remplacer progressivement les anciens réseaux de Wagner. A Bamako, la bannière a changé. Mais sur le terrain, l’empreinte russe demeure.



Source link : https://www.lexpress.fr/monde/afrique/wagner-se-retire-du-mali-quest-ce-que-lafrica-corps-le-groupe-paramilitaire-qui-prend-son-relais-7QV4VELQCNHLTB62EO74PMXZUU/

Author : Audrey Parmentier

Publish date : 2025-06-07 15:00:00

Copyright for syndicated content belongs to the linked Source.

Tags : L’Express
Quitter la version mobile