« 12 sur une échelle de 0 à 10 ». C’est la note dithyrambique attribuée par Donald Trump à sa négociation avec son homologue chinois Xi Jinping, le 30 octobre, en Corée du Sud, qui a permis une trêve commerciale entre les deux superpuissances. Peut-être aurait-il dû utiliser un boulier chinois pour aboutir à un calcul plus juste. Car non seulement l’apaisement pourrait être de courte durée, tant la rivalité sino-américaine est intense, mais Trump a fait nombre de concessions, sans obtenir d’avancée majeure.
Principal soulagement, Pékin a suspendu pour un an ses restrictions sur les exportations de terres rares, dont elle a le quasi-monopole et qui sont cruciales pour le secteur de la high-tech américaine. Dans la foulée, les Européens, eux aussi visés par cette mesure qui aurait paralysé leurs fabricants de moteurs électriques, d’éoliennes ou de missiles, ont également été épargnés. Alors que les 27 craignent d’être les victimes collatérales de la course entre Washington et Pékin pour le leadership mondial, jamais la dépendance à la Chine n’a paru aussi dangereuse.
Xi Jinping n’a cessé de consolider son pouvoir
Car l’empire du Milieu ne craint plus désormais de montrer sa force. « La montée en puissance de la Chine dans tous les domaines (économique, technologique, militaire et diplomatique) n’a fait qu’affermir sa confiance en elle », souligne Alice Ekman, directrice de la recherche de l’Institut d’études de sécurité de l’Union européenne.
D’autant que Xi Jinping n’a cessé en parallèle de consolider son pouvoir – il est sorti encore renforcé d’un récent plénum du Parti communiste qui a fixé comme priorité « des améliorations substantielles en matière d’autonomie scientifique et technologique » sur la période 2026-2030. De fait, contrairement aux autres pays harcelés par des hausses de taxes douanières américaines depuis avril, la Chine ne s’est pas couchée. Mieux, en rendant coup pour coup, elle a prouvé qu’elle boxait dans la même catégorie et pouvait faire reculer le leader mondial en ciblant ses faiblesses.
L’ambition de plus en plus affirmée de la Chine, qui veut remodeler l’ordre international selon ses intérêts, a des répercussions sur l’Europe. Sa percée tous azimuts s’incarne à présent dans des marques connues, comme le prouvent l’installation controversée de la marque de fast fashion Shein dans le bâtiment amiral du BHV, à Paris, l’engouement pour les figurines en peluche Labubu ou la popularité du réseau social TikTok.
L’UE tente de se protéger
Redoutant de voir la Chine écouler ses surcapacités de production sur le Vieux Continent, l’Europe, dont le déficit commercial avec le géant asiatique se creuse, tente de se protéger en imposant des normes strictes ou en taxant certaines marques de voitures électriques chinoises, au grand dam de Pékin.
Ces tensions commerciales s’ajoutent à de graves divergences géopolitiques : le soutien diplomatique et économique de la Chine à la Russie dans sa guerre contre l’Ukraine a particulièrement refroidi les Européens. Ce qui n’empêche pas Pékin de chercher à éloigner l’UE des Etats-Unis, en arguant que l’Amérique n’est plus un partenaire fiable. « La Chine souhaite voir l’Europe adopter une approche plus pragmatique à son égard, compatible avec le nouvel équilibre des pouvoirs », résume Yun Sun, du Stimson Center, à Washington.
Pour l’heure, l’UE, trop divisée et en retard en matière d’innovation, se trouve en position de faiblesse, face à des « hommes forts » américain et chinois bien déterminés à « rendre leur grandeur » à leur pays. Il serait temps qu’elle se prépare elle aussi à un véritable rapport de force.
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Author : Cyrille Pluyette
Publish date : 2025-11-05 05:30:00
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